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La peine de mort au Maroc : En attendant une décision royale

octobre 10, 2010

L’abolition de la peine de mort fait débat au Maroc depuis plusieurs années. Les tribunaux marocains continuent à prononcer des peines de mort* mais aucune exécution capitale n’a eu lieu dans le royaume depuis 1993. Depuis cette date le royaume observe un moratoire de fait. De même, le roi Mohamed VI a gracié à plusieurs reprises des condamnés à mort qui ont vu leur peine se transformer en peine à perpétuité.

Chaque année à l’approche de la journée mondiale contre la peine de mort, le débat reprend de plus belle. Mais chaque année le Maroc laisse la communauté internationale avec un sentiment de frustration car chaque année le pays parait tellement proche pour sauter le pas sans qu’il ait suffisamment de courage pour le faire. Les attentes de la communauté internationale peuvent également se comprendre car le Maroc est le seul pays arabo-musulman qui soit candidat pour l’abolition et qui représente par ailleurs la locomotive régionale en matière du respect du droit de l’homme. En effet, l’abolition de la peine de mort au Maroc ne laissera sans doute pas indifférents  les autres pays de la région, notamment la Tunisie dont le modèle est  similaire à celui du Maroc. Les tunisiens qui étaient précurseurs en matière du droit de la femme auraient du mal à accepter une telle contradiction. En Algérie qui accuse beaucoup de retard en matière du respect du droit de l’homme, l’abolition de la peine de mort au Maroc permettrait éventuellement d’ouvrir enfin le débat, certainement pas par conviction mais tout simple parce que tout qui se passe au Maroc intéresse forcement ce pays. Dans les pays du golf comme l’Arabie Saoudite où l’exécution publique au sabre représente encore une attraction populaire, il n’y a aucune chance pour que ce débat ne soit d’actualité un jour. Mais, la Jordanie regarderait sans doute avec attention l’expérience marocaine.

Par ailleurs, le Maroc a ratifié le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques, la Convention sur les Droits de l’Enfant, la Convention contre la Torture et les traitements et punitions cruels, inhumains ou dégradants, et a signé le statut de la Cour Pénale Internationale (qui interdit le recours à la peine de mort). Cela signifie qu’en maintenant la peine de mort, le Maroc se retrouve dans l’illégalité par rapport à ses engagements internationaux.

Cette année la pression sur le Maroc pour qu’il abolisse la peine de mort est montée d’un cran. En effet, dans un communiqué l’Union Européenne vient d’appeler le Maroc à abolir la peine de mort en indiquant « qu’une telle décision serait la démonstration de valeurs partagées avec l’Union européenne qui constituent la base du développement de ses relations avec le Maroc, dans le cadre du statut avancé ». L’appel ne peut être plus clair et apporte de l’eau au moulin des abolitionnistes marocains, surtout lorsque l’on sait à quel point le Maroc est sensible aux recommandations de son premier partenaire.

Sur le plan interne, la persistance de la peine de mort représente une aberration juridique et une contradiction flagrante avec le discours officiel pourtant sur le respect du droit de l’homme, la réforme pénale et la réinsertion des détenus.

En 2005, le ministre marocain de la Justice tout en se prononçant en faveur de l’abolition, déclarait que la société marocaine n’était pas encore prête à franchir le pas. Il avait préconisé une abolition par étapes. Depuis cette date le paysage social marocain s’est métamorphosé et les marocains ont gagné en maturité. On assiste à l’émergence d’une classe moyenne, un recul significatif de l’alphabétisme et la consolidation de l’Etat de droit. Aujourd’hui la société marocaine est majoritairement acquise à l’abolition de la peine de mort. Cette adhésion n’est rien d’autre qu’une réponse naturelle à sa propre mutation.

La résistance en faveur du maintien de la peine du mort est jusqu’à présent orchestrée par les islamistes, notamment le Partie Justice et du Développement (PJD), qui surfaient sur une idée manifestement diffamatoire et outrageuse envers l’islam. Selon eux, la peine de mort serait en conformité avec les percepts de l’Islam qui représente l’un des fondements de la législation marocaine. Curieusement, ces islamistes semblent être absents du débat public actuel sur le sujet. Connaissant le tapage médiatique que seuls les islamistes ont en le secret, cette absence pourrait être interprétée comme un revirement de position, ce qui signifie encore que tout report supplémentaire de l’abolition ne peut désormais être dû qu’à l’inertie et à l’autocensure des politiques. Dans le passé, certains débats sur des sujets sensibles, comme la Moudawana (le nouveau de la code de la famille), ont pris plusieurs années avant que le roi décide d’y mettre fin. Avec la persistance de la peine de mort dans un contexte qui est favorable à son abolition, les marocains se retrouvent,  encore une fois de plus, otages des politiques qui s’installent dans la stérilité du débat et qui se plaisent à se réduire en mineurs en attendant que le roi décide pour eux.

Adil B.

* L’article 16 du Code pénal marocain prévoit la peine de mort par fusillade pour l’homicide aggravé, la torture, le vol à main armée, l’incendie criminel, la trahison, la désertion, et enfin l’attentat à la vie du roi.

André Azoulay: L’architecte de la préservation de l’héritage juif marocain

juin 20, 2010

Jeune Afrique : Extrait de l’article publié dans Haaretz, quotidien israélien

J’ai rencontré peu de gens aussi admirables qu’André Azoulay, conseiller de longue date du roi du Maroc. Lui et sa femme, Katia, sont nés à Essaouira, la seule ville du monde arabe à avoir été majoritairement juive. L’attitude et les propos d’André Azoulay témoignent de sa noblesse et de sa perspicacité. Lorsque je l’ai rencontré pour la première fois, il y a vingt-cinq ans, j’ai téléphoné à l’hôtel où il était logé, à Jérusalem, et demandé à parler à M. Azoulay. « Est-ce qu’il travaille à l’hôtel ? » m’a demandé le réceptionniste, visiblement incapable d’imaginer qu’un dénommé Azoulay puisse être un client.

Lors de notre rencontre en avril, il était abattu et perturbé. Pour la première fois au cours de sa longue carrière de conseiller de Hassan II, puis de son fils Mohammed VI, l’actuel monarque, Azoulay a été accusé d’être un agent du Mossad par un avocat local, Khalid Soufiani, un militant de la cause palestinienne.

Azoulay a un parcours impressionnant. Il a fondé le groupe Identité et Dialogue, l’un des premiers cercles à avoir appelé à des négociations entre Palestiniens et Israéliens dans les années 1970, et il a, tout au long de sa carrière, plaidé pour la paix entre Juifs et Arabes. Il s’est toujours senti fier de son identité juive tout en étant un patriote marocain. Tout compte fait, il est étonnant qu’il n’ait pas été accusé plus tôt de travailler pour le Mossad. Après tout, être juif et conseiller du roi dans un pays arabe n’est pas banal, d’autant qu’il a possédé une maison en Israël.

Les journaux du royaume ont immédiatement défendu Azoulay. De son côté, il n’a pas hésité à participer, en avril, au dîner annuel du Club Mimouna, une association qui a pour but de préserver l’héritage culturel juif au Maroc. L’entrée de l’auditorium était ornée d’une grande inscription en hébreu, et le secrétaire d’État au Tourisme était présent à la cérémonie d’ouverture. Je n’en croyais pas mes yeux. Décidément, le Maroc se révélait très différent de ce que j’imaginais. À Fès, par exemple, le cimetière juif est mieux entretenu que n’importe quel cimetière musulman d’Israël, et la synagogue de la ville a été restaurée, à l’initiative d’Azoulay, évidemment.

Gideon Levy

Najlae Lhimer, les petits mensonges d’une clandestine

mars 14, 2010

Najlae Lhimer, une clandestine marocaine expulsée le 20 février dernier vers le Maroc, est revenue en France le 13 du même mois, après l’intervention de Nicolas Sarkozy. A l’occasion de la journée de la femme, celui-ci s’était dit « prêt d’accueillir Najlae en France si elle le souhaite ». A son retour en France, elle a été reçue en starlette à  l’aéroport d’Orly. Tout un petit monde qui se bousculait pour se prendre en photo avec la clandestine la plus célèbre de France. Cette mascarade qui donne une idée de désolation sur l’inégalité des individus devant les lois de la république.

Toute le monde essaye de tirer profit de cette histoire. Des associations des droits de l’Homme qui se rappellent de leur rôle dans le cas de cette fille alors qu’elles brillent par leur absence devant les réels drames humains des irakiens, des kurdes, des afghans et des africains. Certains politiciens quant à eux s’invitent à la recherche des miettes à la veille des élections régionales, qui n’intéressent d’ailleurs personne. L’incroyable couverture médiatique du cas Najlae Lhimer contraste avec le désintérêt des journalistes pour les SDF parisiens. C’est vrai que présenter un SDF à 20h n’est pas beau à voir, c’est à la limite de l’agressivité journalistique. Cette fille leur donne l’occasion de présenter un drame propre.

Mais ce qui est intriguant se sont les déclarations de l’intéressée. Najlae Lhimer se dit qu’elle avait fuit le Maroc en 2005 pour s’échapper à un mariage forcé organisé par son père. C’est un argument qui alimente l’émotion, les clichés, voire l’ignorance des français envers certains pays comme le Maroc. Pourtant, pourvu que l’on s’intéresse un petit peu à ses déclarations à la lumière de la loi au Maroc pour que l’on réalise que cette fille n’est rien d’autre qu’une petite menteuse.

Le nouveau code de la famille au Maroc (la Moudawana) est rentré en vigueur en février 2004. Il a porté l’âge de la majorité à 18 ans, soit l’âge légal du mariage. En outre ce même code précise explicitement qu’une femme ne peut se marier contre son gré. La Moudawana a fait tellement de bruit et considérée comme l’une des plus grandes réussites du roi du Maroc qu’à 14 ans aucun juge au Maroc (Ladoul)  n’aurait accepté de la marier.

Ses petits mensonges viennent également du fait qu’en 2005 elle avait des parents et des amis, mais curieusement en 2010 ils se sont volatilisés. Elle se dit qu’elle n’a plus de liens avec le Maroc.  Une façon de dire qu’elle bien intégrée en France. Dans les médias marocains qui ont pris la peine d’enquêter sur place, on apprend qu’elle vient d’une famille nombreuse assez aisée. Ses parents sont toujours en vie et sont meurtris par les mensonges de leur fille. Pour  pouvoir justifier son cas et rester en France, Najlae Lhimer renie donc toute sa famille et ses amis . Et pour accabler ses parents, elle déclare visiblement heureuse de ce qui lui arrive, qu’elle reviendrait au Maroc « pour revoir les gens qui l’ont aidée ».

Mais à quoi peut-on s’attendre d’une fille qui avait choisi de se porter clandestine à l’âge de 14 ans avec une éducation parentale inachevée ? pas à grand chose, la preuve que même à 19 ans, elle n’a pas encore compris ce que signifie la dignité. Pour elle c’est sans doute un concept réservé aux grands. 19 ans n’est à priori pas assez pour le devenir et encore moins pour l’être.

Code de la famille marocain : http://www.justice.gov.ma/MOUDAWANA/Codefamille.pdf

Maroc : Pendez-le haut et court

janvier 21, 2010

Depuis plusieurs années de véritables réseaux internationaux de propagandes anti-marocaines structurés ont été mis en place dont la seule mission est de déstabiliser le Maroc, porter atteinte à ses institutions, remettre en question son intégrité territoriale et mettre en difficulté ses relations avec ses amis traditionnels, notamment la France et l’Espagne. Sur Internet c’est une vraie bataille qui est livrée aujourd’hui contre le Maroc. Ces réseaux sont activés aux rythmes des campagnes pour instrumentaliser d’une façon abject et immorale le moindre fait divers dans les provinces du sud du Maroc. La manœuvre consiste à crier au scandale et enclencher la machine des protestations diplomatiques au niveau international.


Dans la dernière affaire de Aminatou Haïdar, on a mesuré toute l’efficacité de ces réseaux. Aussi, une dame marocaine d’un niveau intellectuel très modeste au discours décousu, qui insulte des fonctionnaires de l’Etat, déchire et piétine son passeport en présence du procureur du roi, s’est retrouvée par miracle hissée au rang d’une grande pacifiste, d’une grande défenseuse des droits de l’homme et dont le niveau intellectuelle ferait d’elle une bonne candidate au prix Goncourt. Une énorme supercherie médiatique a ainsi efficacement été orchestrée dont le seul but est de discréditer les acquis démocratiques du Maroc.

L’analyse des différentes campagnes médiatiques mène systématique au même foyer; l’Algérie. Ce pays parait jouer le rôle de chef d’orchestre dans chaque campagne. La présence de ce pays garantie un financement généreux des actions médiatiques. On retrouve également au cœur de ces compagnes les mêmes organes de presse notamment Le Monde (quotidien français) et El Mundo (quotidien espagnol). La présence des organes médiatiques aussi puissants au sein de ces réseaux garantie un très large écho des campagnes anti-marocaines. A ce dispositif médiatique permanent se griffent occasionnellement certains politiciens nordiques qui ont une vision complètement tronquée du Maroc pour ne pas dire du Monde et des héritiers de la dictature franquiste qui n’ont jamais pardonné au Maroc sa marche verte, sans oublié l’agonisant parti communiste français qui préfère perpétuer le combat d’un certain Georges Marchais contre le Maroc. La presse algérienne qui n’a rien de presse si ce n’est le nom, est là pour nous rappeler tout ce que l’être humain pourrait incarner de méprisant, de haineux et de primitif. Cette presse a fait du Maroc son fond de commerce, même si l’Egypte partage occasionnellement avec le Maroc la vedette, lorsque Aljazira s’invite au plat marocain attirée par le sang tel un charognard pour attiser sa macabre réputation.

Les raisons de l’Algérie sont bien connues. Ce pays manifeste une hostilité envers tous ses voisins sans exception, mais c’est envers le Maroc que son hostilité tourne quasiment à l’obsession. Les raisons de la participation des organes de presses internationaux cités plus haut sont en revanche difficiles à comprendre, mais il faut croire qu’ils y trouvent sans doute un moyen pour régler certains comptes avec le Maroc. Le traitement particulier du Maroc devient si important pour eux que certains journalistes s’y sont improvisés spécialistes. Aussi, au journal Le Monde par exemple un certain Jean-Pierre Tuquoi s’est spécialisé dans le dénigrement du Maroc et ses institutions. Ce journaliste qui à défaut de se faire une place par la plume essaye de se la faire par la déprime. Il nous a prédit la fin de la monarchie marocaine, mais voilà que les marocains n’ont jamais été aussi monarchistes qu’aujourd’hui. Ce journaliste de petite envergure ne ratte aucune occasion pour dénigrer le Maroc en ruminant en permanence le même discours de mensonges et de désinformations délibérés que sa disciple, une certaine Florence Beaugé, se fait un grand plaisir de remixer et de resservir à sa propre sauce.

Force est de constater que ces réseaux sont tellement efficaces, que l’Algérie a partiellement réussi son entreprise, puisque d’une part ce dernier temps le Maroc est injustement accusé de tout bord de « violations graves de droit de l’homme », et d’autre part elle a réussi à faire oublier au monde ce qui se passe chez elle en matière des violations institutionnalisés des droits de l’homme sous prétexte de la lutte contre le terrorisme.

Mais comme dit-on tout vient à temps à celui qui sait attendre. Lorsque le Maroc vient d’être classé dans le rapport 2010 de Freedom House sur la liberté dans le monde, en tête des pays du Maghreb en matière des droits politiques et des libertés civiles, et d’être reconnu par sa volonté politique de promouvoir la situation des droits de l’homme par Amnesty International, l’Algérie quant à elle vient d’être mise sur la liste noire des pays exportateurs du terrorisme par les Etats-Unis et la France au même titre que la Somalie. Cela raisonne comme une invitation pour chacun à retrouver sa place, mais certainement pas à la même tribune.

Adil B.

Algérie : Ce grand pays des droits de l’homme !!

décembre 19, 2009

Actuellement, le régime algérien mène une campagne à grande échelle pour faire passer le Maroc pour une grande dictature. L’avalanche des articles dans les médias algériens et les conférences successives organisées à Alger consacrés aux droits de l’homme dans les provinces marocaines du sud, laissent à penser que ces provinces vivent au rythme des arrestations, des tortures et où l’Etat de droit a cédé place à l’arbitraire. Cette exploitation du thème des droits de l’homme par l’Algérie laisse perplexe pour deux raisons. Ce pays s’indigne des « graves violations des droits de l’homme au Maroc », alors qu’il est loin d’être une référence en la matière. Bien au contraire, actuellement parmi les pires violations des droits de l’Homme dans le monde sont enregistrés en Algérie. Aucune ONG ne peut s’aventurer en territoire algérien. La connivence de certaines organisations algériennes censées  défendre les droits de l’homme en Algérie avec le régime en place était manifestement flagrante lorsque le président de la commission consultative pour la promotion et la protection des droits de l’Homme, Farouk Ksentini, déclarait en avril 2008 : « Comment peuvent-ils nous demander le moment où nous permettrons aux délégués de la commission onusienne de visiter l’Algérie ? L’Algérie n’est pas un gourbi, où quiconque peut venir à n’importe quel moment ».  Cette déclaration a été faite au moment même où la police tabassait les médecins et les fonctionnaires en plein centre d’Alger.

Durant la guerre civile meurtrière qui ravage le pays depuis les années 90 et qui est décrite par l’ex-officier algérien Habib Souaïdia dans son livre « la sale guerre », plus 200 000 personnes avaient été tuées. Des dizaines de milliers d’entre elles étaient des civils, hommes, femmes et enfants, qui sont morts lors d’attaques meurtrières. Des milliers de personnes ont été torturées en détention. Des milliers d’autres ont disparu après leur arrestation par les forces de sécurité ou ont été enlevées par des groupes armés et exécutés sommairement. Sous prétexte de la lutte contre le terrorisme, le champ est libre à toute forme de tortures et aux liquidations physiques. Plusieurs témoignages de villageois concordants rapportent que plusieurs massacres ont été perpétrés par des militaires ou des paramilitaires déguisés en islamistes.
Dans la grande majorité des cas, les autorités n’ont rien fait pour éclaircir les circonstances des crimes et traduire leurs auteurs présumés en justice. Mais, il est difficile de demander à un régime d’éclaircir certains crimes, lorsque ce même régime est soupçonné de fermer les yeux, de contribuer ou d’organiser ces crimes. Actuellement, le régime algérien cherche désespérément à couvrir les soldats criminels qui ont assassinés les moines de Tibéhirine. Ces moines ont été enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars 1996. Seules leurs têtes avaient été retrouvées, le 30 mai 2009. Au lieu de traduire les criminels devant la justice, le régime algérien a une explication toute faite qui ne convainc personne. Il attribue ce massacre au Groupe islamique Armé (GIA) de Djamed Zitouni.

En 2005, le président algérien Abdelaziz Bouteflika a fait passé une proposition  d’une amnistie générale, vendue sous le label de la « réconciliation nationale »,  pour les auteurs d’atteintes aux droits humains commis lors de la guerre civile. Son but était de racheter la paix à tout prix sur la base d’un calcul purement électoral quitte à priver définitivement les victimes et leurs familles de leur droit à la justice. Bouteflika a ainsi empêché des notions de justice et de responsabilisation devenir des éléments de la transition vers la paix, faisant de la violation des droits de l’homme une variable intrinsèque dans la mode gouvernance du pays. En avril 2005, plusieurs organisations internationales de défense des droits humains notamment Amnesty International, Human Rights Watch, le Centre International pour la Justice Transitionnelle, la Commission internationale de juristes et la Fédération internationale des Ligues des droits de l’homme, ont protesté contre cette proposition, mais cela n’y a rien changé. Bouteflika a amnistié des assassins et des violeurs, mais l’Algérie n’a jamais retrouvé la paix. Les massacres d’algériens sont encore quotidiennes, mais elles n’intéressent plus les médias internationaux et sont reléguées aux faits divers dans les médias nationaux.

S’exprimant dans le cadre d’une conférence organisée en février 2009 à Naples (sud d’Italie) pour débattre de la situation des droits de l’Homme dans les pays du Maghreb, Madame Nassera Merah, responsable au sein de la Ligue Algérienne des Droits de l’Homme, affirmant que la pratique de la torture est très répandue en Algérie. Elle a indiqué que « tous les droits sont bafoués en Algérie et il n’y a aucune possibilité de protester ou de faire prévaloir le droit, et que la démocratie de façade est en vigueur ». La militante algérienne a fait savoir que sa ligue fait l’objet de pressions à l’intérieur du pays qu’elle est interdite de visiter les prisons et de prendre contact avec les délégations étrangères.

Ce triste registre algérien ne s’arrête pas là. A Tindouf dans le sud ouest du pays, ce sont des milliers de marocains éparpillés dans des camps à perte de vue. Dans ces camps l’humanité a cessé d’exister. Des hommes et des femmes à qui on a volé la jeunesse. Des enfants, des adolescents et des jeunes qui n’ont aucun avenir. Tout ce monde s’observe et attend… quoi ? … rien … de qui ? de personne.

Peut être six œufs et un kilo de riz par semaine de la part des organisations humanitaires complices de ce drame par leur silence. Ces populations sont privées de leurs droits les plus élémentaires dont le droit à la liberté de mouvement. Elles sont entre les mains d’un régime sans scrupule qui les présente comme des victimes de « l’occupation marocaine au  Sahara occidental ». Tindouf c’est une prison à ciel ouvert où les vivants enterrent leurs morts en attendant leur propre tour, sans aucune possibilité de la quitter sans se faire tirer dessus. Seuls les enfants quittent provisoirement les camps pour faire de la charité en Europe ou pour les camps d’endoctrinement à Cuba. Les ONG qui brillent par leur tapage lorsqu’il s’agit des affaires médiatisées dans le monde ne se bousculent aux portes de Tindouf. Elles sont incapables d’organiser un simple recensement ne serait ce que pour rationaliser les aides qu’elles fournissent. Ces aides qui se retrouvent curieusement sur les étalages des marchés d’Alger et non dans les assiettes de ceux à qui elles étaient destinées. Ces organisations se contentent visiblement de cette situation avec une impression du devoir humanitaire accompli.

Dans ses rapports annuels, à propos de la situation des droits de l’homme Amnesty International, fait souvent état de graves violations dans les camps de Tindouf. Cette organisation accuse le régime algérien de son acharnement à verrouiller l’accès aux camps pour les défenseurs des droits de l’homme internationaux, de sa volonté délibérée à maintenir le black-out sur les violations en séries des droits de l’homme sur son territoire, et de ses manquements en matière de la protection des réfugiés.

Les témoignages des réfugiés qui ont fui les camps et des anciens détenus marocains libérés sous la pression internationale dépassent l’imagination. Sur une vidéo qui circule sur le net un ancien prisonnier marocain, Abdellah Lahmani, qui a été enlevé par un commando armée près d’Agadir au Maroc et qui a été détenu dans les camps durant 23 ans, raconte l’implication directe des officiers algériens dans les rapts et la torture des détenus marocains. En une seule phrase il a résumé ce qui se passe dans ces camps de la honte : « je n’ai jamais imaginé que des hommes pourraient atteindre un tel niveau de barbarie », faisant référence à son propre calvaire qu’il raconte avec beaucoup de dignité. Son souhait est de traduire les officiers algériens responsable de sa torture devant un tribunal international.

Si les témoignages des réfugiés qui ont fui les camps et des anciens détenus marocains libérés racontant les mêmes atrocités n’ont généralement pas beaucoup d’écho au niveau international, un documentaire de deux journalistes les australiens, Violeta Ayala et Daniel Fallshaw, a fait le tour du monde. Sans doute parce que la parole d’un journaliste occidental qui raconte ce qu’il a observé vaut mieux que celui d’un marocain qui raconte ce qu’il a vécu. Toujours est-il que ces deux journalistes qui sont partis à Tindouf pour réaliser un film documentaire sur les familles séparés, ont été surpris par des scènes d’esclavage. Leur documentaire a ainsi pris un tournant inattendue pour témoigner d’une réalité actuelle moyenâgeuse cruelle. Ils ont ainsi pu recueillir de nombreux témoignages confirmant l’existence de cette pratique à grande échelle.  Le Polisario espérait sans doute un documentaire de propagande supplémentaire. Les deux journalistes ont été arrêtés par la sécurité du Polisario, mais ont été finalement libérés après intervention du ministère australien des affaires étrangères.

Il est donc difficile d’accorder un quelconque crédit en matière de défense des droits de l’homme à un pays au registre si peu glorieux et qui traîne avec lui l’image désastreuse d’un des régimes les plus sanguinaires de la planète. Un régime où l’histoire, la morale et la pudeur n’ont aucun poids pour représenter un obstacle devant les déclarations calamiteuses. Aussi, Mourad Medelci (ministre des affaires étrangères algérien) n’a pas hésité à évoquer dernièrement, devant le Conseil des droits de l’homme (CDH), des prétendues violations de droits de l’homme au sahara marocain, se préoccupant ainsi du sort des marocains mais oublie le sort des siens.

Le cynisme atteint son paroxysme lors de la mobilisation générale du régime algérien dans l’affaire de la séparatiste marocaine Aminatou Haïdar. Cette mobilisation n’a pas laissé indifférent Hocine Aït Ahmed, fondateur et président du Front des Forces Socialistes (FFS) (parti de l’opposition algérien). C’est l’un des icônes de la scène politique algérienne connu par son intégrité et par son franc-parler. Le 09 décembre 2009, il interpelle les instances onusiennes en adressant une lettre à Navanethem Pillay, haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme au sujet du sort réservé aux militants des droits de l’homme dans son pays. Dans cette lettre il s’indigne du silence complice de cette organisation et accuse l’Union Européenne de fermer les yeux sur les graves violations des droits de l’homme dans son pays. Hocine Aït Ahmed se dit victime d’un harcèlement policier, administratif et judiciaire permanent. Il accuse son pays d’user d’un double langage en faisant référence à la mobilisation générale au niveau national et international du régime algérien pour défendre la cause de Aminatou Haïdar et en même temps le peuple algérien est empêché de s’exprimer librement. Hocine Aït Ahmed va encore plus loin en affirmant que les représentations diplomatiques dans son pays sont sous contrôle. Ce silence onusien et européen contraste avec l’hyper activisme de l’UN et de l’EU au Maroc au sujet des droits de l’homme au Maroc.

Adil B.

Algérie : Un boomerang appelé Aminatou Haïdar

décembre 18, 2009

L’Algérie voulait faire de l’Affaire de Aminatou Haïdar une charge contre le Maroc en matière des violations des droits de l’homme, cette affaire s’est transformée en fin de compte en une confirmation de la souveraineté marocaine sur ses provinces du sud. Dans la nuit du 17 au 18 décembre cette femme a été autorisée à revenir au Maroc. Le Maroc a non seulement réussi à ce que cette femme accomplisse les formalités en vigueur pour accéder au territoire marocain, reconnaissant ainsi sa marocanité et la marocanité du sahara marocain, mais a pu obtenir une confirmation supplémentaire de la part de la France dans sa reconnaissance de la marocanité du sahara et un engagement supplémentaire de la part de l’Espagne dans son adhésion en faveur de la proposition marocaine de l’autonomie sous souveraineté marocaine.

En effet dans un communiqué de l’Elysée rendu public, le président français Nicolas Sarkozy, qui a de toute vraisemblance joué un rôle décisif dans le dénouement de cette affaire, précise que « la législation marocaine s’applique au sahara » et exprime son vœu que le Maroc puisse « remettre à Madame Aminatou Haidar son passeport marocain à son arrivée sur le territoire du Royaume ». Le président français précise donc bien que cette femme sera à  Laâyoune, en territoire marocain où s’applique la législation marocaine. Cela nous rappelle les mêmes tournures linguistiques diplomatiques d’un certain Jacques Chirac qui parlait des provinces marocaines du sud.

L’Espagne qui était tentée par le forcing en début de cette affaire a publié un communiqué d’une très grande portée et qui ne laisse aucun doute de son alignement sur la solution proposée par le Maroc. « Pendant que l’on trouve une solution au contentieux du Sahara et en conformité avec la position des Nations Unies, l’Espagne constate que la Loi Marocaine s’applique au Sahara » précise le communiqué espagnol. L’Espagne a en outre profité de ce communiqué pour donner une réponse sans équivoque à l’Algérie et aux autres parties qui ont manœuvré durant cette affaire pour nuire aux relations entre l’Espagne et le Maroc. « Le gouvernement d’Espagne salue la politique de modernisation et de réformes entreprises par les autorités du Royaume du Maroc et s’engage à l’accompagner. Dans ce sens, le gouvernement réaffirme sa volonté d’approfondir sa coopération dans le cadre du statut avancé convenu entre l’Union Européenne et le Maroc », conclut le communiqué.

La France et l’Espagne renvoient donc l’Algérie à cette amère réalité qu’elle n’arrive pas encore à digérer, et au passage ils donnent une belle leçon à la Suède qui a cru pouvoir profiter de son passage à la présidence de l’EU pour régler ces comptes avec le Maroc. Ce pays est l’un des grands pourvoyeurs en fonds en en logistique au Polisario. Il a l’air de confondre soutien humanitaire et soutien au terrorisme. Ses collisions avec le Maroc sont récurrentes. En novembre dernier le Maroc a expulsé la conseillère de l’ambassade suédoise à Rabat, Anna Block-Mazoyer, qui a été impliquée dans une affaire portant atteinte aux intérêts du pays hôte. Elle a transmis un document diplomatique à des éléments séparatistes, liés à l’Algérie et au Front polisario. Par la suite, ce document s’est retrouvé naturellement entre les mains de ces derniers. Dans l’affaire Aminatou Haïdar, la Suède s’est précipitée d’envoyer une sommation au Maroc en l’invitant à collaborer avec l’Espagne.  Le communiqué de la France et  celui de l’Espagne lui ont fait comprendre que l’on ne traite pas avec le Maroc avec une telle légèreté, et que sa vision tronquée du Monde est loin de l’aider à comprendre des sujets aussi complexes que celui du sahara marocain.

Adil

Devoir de vérité : Qui a tué les moines de Tibéhirine

juillet 12, 2009

N’importe quelle personne avec un minimum d’humanisme doit s’interroger sur les raisons de l’assassinat des moines de  Tibéhirine en Algérie. Le président Nicolas Sarkozy a assuré qu’il levrait le secret-défense sur tous les documents qui seront demandés par la justice française.. Alixis BREZET dans Le Figaro magazine du Samedi 11 juillet 2009 se pose les bonnes questions sans partie prise.

Leur mort, à la différence de celle du «roi de la pop», n’a pas été suivie d’un deuil planétaire, médiatique et obligatoire. Pour eux, ni cercueil doré à l’or fin, ni torrents de larmes cathodiques, ni cérémonie grandiose en mondovision. Leur héritage ne pèse pas son poids de millions de dollars : ils étaient riches seulement de leur foi et de leur pauvreté. Et pourtant, treize ans après, le sauvage assassinat de frère Christian, frère Luc, frère Christophe, frère Michel, frère Célestin, frère Paul et frère Bruno continue de susciter un écho douloureux dans le coeur des hommes de bonne volonté.Le martyre des moines de Tibéhirine, coupables d’avoir voulu témoigner de l’Évangile par la prière et la fraternité avec le peuple algérien, reste pour des millions de chrétiens et de non-chrétiens, de part et d’autre de la Méditerranée, une cause de scandale d’autant plus vivace qu’un troublant halo de mystère semble entourer les circonstances de leur disparition.

Il faut lire le témoignage précis et émouvant du père Armand Veilleux, ancien procureur général de l’ordre des Cisterciens, que nous publions cette semaine. Du récit circonstancié de celui qui fut le responsable des frères de Tibéhirine, une impression se dégage : celle que la vérité, piégée dans les entrelacs des rivalités de services, des complaisances judiciaires, des compromissions diplomatiques, des transactions politiques, a été, tout au long de ces années, volontairement laissée de côté. Comme si planait sur cette tragique affaire l’ombre d’un mensonge d’État.

Les sept religieux ot-ils été enlevé et massacrés par un commando du Groupe islamique armé, comme l’affirme la thèse officielle ? Ce groupe, ainsi que le soutient une deuxième thèse accréditée par certains témoignages, était-il lui-même «l’instrument» du pouvoir algérien (ou d’un clan au sein de ce pouvoir) qui aurait pu vouloir, en fomentant cet acte monstrueux, dresser l’opinion publique internationale contre le « péril islamiste » ? Les moines, selon une troisième thèse qui s’appuie sur la déposition d’un officier français révélée cette semaine par Le Figaro, sont-ils tombés sous les balles des militaires algériens lors d’une opération de « ratissage» qui aurait mal tourné ? Les mêmes auraient-ils commandité, ou perpétré, deux mois plus tard l’assassinat de Mgr Claverie, l’évêque d’Oran, coupable de s’intéresser d’un peu trop près à la question ? Les autorités françaises, par souci de ménager les services algériens dont la collaboration était jugée indispensable pour démanteler les réseaux terroristes à l’œuvre sur notre territoire, ont-elles tu ce qu’elles savaient ? Ont-elles préféré ne pas savoir ? Autant d’interrogations auxquelles la levée du secret-défense annoncée par Nicolas Sarkozy permettra, peut-être, d’apporter des réponses judiciaires. Au lendemain d’une décision analogue dans le dossier de l’attentat de Karachi (lui aussi mis un peu vite sur le dos des islamistes ?), on ne peut que se réjouir que soient levés, côté Français, les obstacles à la manifestation de la vérité.

Evidemment, côté algérien, l’affaire n’ira pas sans causer quelques difficultés. Prompt à exiger de la France les démonstrations d’une éternelle repentance (mais le ferait-il encore si notre pays, par lâcheté, ne l’y avait si longtemps encouragé ?), Abdelaziz Bouteflika n’est guère désireux que remontent à la surface les secrets de certaines compromissions avec les islamistes qui, depuis le temps de son prédécesseur Liamine Zeroual (au pouvoir à l’époque du drame de Tibéhirine), ont pris les apparences d’un véritable – et inquiétant – «compromis historique ». Pas plus qu’il ne souhaite que soit attirée l’attention des opinions européennes sur le sort des chrétiens d’Algérie, victimes, dans l’indifférence générale, d’une véritable campagne de persécution. Attendons-nous (c’est parti !) à de violentes attaques contre « l’esprit de vengeance » de la «puissance coloniale»…

Vengeance ? Aucun mot n’était pourtant plus étranger au vocabulaire des moines de Tibéhirine. Deux ans avant une mort qu’il avait par avance offerte en sacrifice, Christian de Chergé, le prieur de la communauté, dans un «testament » bouleversant, avait déjà pardonné à ses assassins. Mais le pardon n’est pas l’oubli. Il suppose la connaissance des faits : rien ne justifierait que l’on ensevelisse dans le linceul du mensonge les martyrs qui ont péri au nom de la vérité.

Le bloggueur : Une parodie de justice

septembre 13, 2008

Le bloggueur marocain d’Agadir a été condamné à 2 ans de prison pour “manquement au respect dû au roi” dans un article qu’il aurait écrit sur un site amateur. C’est l’explication propagée en tout cas. S’agissait-il d’un juge zélé ou pas ? Cet article, s’agit-il du vrai motif de son arrestation ou pas ? Mais peu importe, puisque personne ne semble s’intéresser à la question. La presse a retenu ce qu’elle avait envie de retenir, la majorité des marocains ont retenu l’explication qu’on leur a servie et L’Etat joue comme d’habitude à l’abonné absent. Tout le monde est finalement dans son rôle, mais on ne va pas refaire un débat qui n’a jamais existé.

La Cour d’appel d’Agadir vient d’accorder la liberté provisoire à ce bloggueur. Est-ce une bonne ou mauvaise chose ? Je n’en sais rien car je ne suis pas dans le secret de cette affaire, comme toute le monde d’ailleurs même si tout le monde se donne l’impression de l’être. Mais voilà ce qui est intriguant. La cour d’appel a justifié sa décision de libérer le bloggueur par le fait que le tribunal de première instance « n’avait pas respecté certaines dispositions procédurales prévues par le code de la presse ». Par un miracle que seule la justice marocaine pourrait expliquer, on passe donc d’une condamnation relevant du code pénal à une libération fondée sur le code de la presse. Alors 2 interrogations :

1. Pour le néophyte de droit que je suis, un délit de “manquement au respect dû au roi” relève du code pénal et non du code de la presse. Pourquoi alors la cour d’appel se réfère t-elle au code de la presse pour juger une affaire relevant du code pénal, et donc pour libérer ce bloggueur ?

2. Dans tous les cas, pour que le code de la presse soit appliqué il faut que le présumé coupable ait le statut de journaliste. Ce bloggueur serait-il alors journaliste ? ou plutôt aurait-il écrit ce fameux article en tant que journaliste ?

Un bloggueur proprement parlé est un citoyen ordinaire qui a envie tout simplement de partager ses idées et ses opinions avec les internautes. Il n’est pas journaliste. En réalité la question ne se pose pas, même si certains s’amusent curieusement à se la poser. Exprimer ces opinions sur un support ou sur un autre ne fait pas d’une personne un journaliste, sinon la moitié de la planète serait peuplée de journalistes. Qu’il publie sur un support écrit ou sur un support électronique, pour être considéré comme journaliste il faut avoir une carte de presse. La cour d’appel ne semble pas de cet avis puisque l’explication qu’elle avait donnée laisse à penser qu’elle considère désormais un bloggueur comme journaliste. Ce qui porte naturellement atteinte au métier du journalisme. La cour dans sa précipitation ouvre de ce fait une brèche vers une jurisprudence et vers un désordre programmé du journalisme électronique .

La question de savoir si ce bloggueur est un journaliste ou non mérite d’être posée pour la seule et unique raison que beaucoup de journalistes qui, en plus de leur travail, maintiennent leurs propres blogs où ils peuvent s’exprimer avec plus de liberté. Personnellement j’en doute pour au moins 2 raisons. La première est que le site sur lequel il aurait écrit l’article présumé est un site amateur et non journalistique. Sur ce site lui-même on peut lire en arabe que le site n’est pas responsable du contenu des articles qu’il publie, et que ces articles expriment les opinions de leurs auteurs et non celles du site. Un site journalistique n’aurait jamais écrit ce genre d’avertissements au sujet des articles qu’il décide lui-même de publier. Nous sommes donc en présence d’un site d’expression d’opinions, en claire un forum ou un blog collectif, même si le site n’était pas présenté dans le style classique des forums ou des blogs. La seconde raison est que à la lecture de ce que ce bloggueur avait écrit, de toute évidence il n’a pas de formation de journaliste. Il s’exprime avec beaucoup de légèreté et de liberté. Evidement en tant que bloggueur personne ne peut lui reprocher cela.

Monsieur Abderrazak Al mazzini, un spécialiste juridique dans les technologies de l’information, me conforte avec subtilité dans mes déductions. Il a déclaré sur la chaîne arabophone Al Jaseera « qu’au Maroc il y a 2600 cartes de presse dont une seulement est attribuée à un journaliste électronique. Les autres travaillent en dehors du cadre juridique marocain de la presse ». On l’a compris, ce bloggueur ne dispose pas de statut de journaliste et la cour d’appel aurait pu nous sortir avec beaucoup plus d’intelligence d’une affaire encombrante, où l’ignorance courtise la sympathie et la manipulation.

Le bloggueur et le virtuel

septembre 12, 2008

En 24 heures chrono l’affaire du bloggueur marocain d’Agadir s’est propagée comme une traînée de poudre. Il a fallu qu’un site amateur publie le cas d’un bloggueur marocain qui aurait été condamné à deux ans de prison pour « manquement au respect dû au roi » dans un article que ce bloggueur aurait publié sur le net, avec un mensonge notoire comme quoi le bloggueur n’aurait  le droit à aucune défense juridique. Pire encore, d’après le site en question, il n’aurait même pas le droit de s’expliquer devant son juge. Tout le monde a repris l’affaire.  Les internautes marocains se sont emparés toute de suite de l’affaire. RSF, ce canard boiteux, trouve dans cette affaire un beau cadeau pour redorer une certaine crédibilité dont elle ne dispose plus. Les agences de presse internationales ont suivi. RSF qualifie cette décision « d’injuste » et le Maroc comme « l’un des régimes les plus totalitaires ». Dans un manque total de respect à l’égard des institutions du Maroc, elle invite celui-ci à annuler purement et simplement cette décision judiciaire.

La majorité des internautes marocains ont soutenu le bloggueur avant même de savoir de quoi il a été exactement accusé. Il a fallu juste qu’on dise que c’est un bloggueur, et c’est une raison suffisante pour lui donner raison. L’explication donnée par le site est prise comme argent comptant. L’article incriminé est écrit avec la légèreté d’un bloggueur amateur, mais il n’y a vraiment de quoi en faire un plat. Dire qu’un jugement de 2 ans est fondé sur un tel article est tellement grotesque et ridicule que toute personne avec un minimum de lucidité aurait raison de se poser la question sur les vraies raisons de cette condamnation. Sauf, si on soutenait l’idée que la justice marocaine est à la solde de l’Etat et qu’au Maroc il n’y a pas un seul juge qui serait intègre.

En quelques heures un site amateur est devenu, pour beaucoup d’internautes marocains, la référence en matière du droit d’expression et un bloggueur inconnu il y a à peine 24h est hissé quasiment au rang de héros national et devenu le nouveau symbole de l’oppression de l’Etat marocain en matière de la liberté d’expression. Les internautes marocains donnent cette impression de vouloir s’accrocher à quelque chose à tout prix, même si ils devaient s’accrocher à n’importe quoi.

Maintenant, il suffit d’un rien pour mettre le Maroc au poteau. C’est une affaire qui démontre une fois de plus que nous avons un sérieux problème de maturité intellectuelle, et que le marocain démocrate et citoyen est encore dans l’éprouvette. Mais cette affaire a l’avantage de nous donner une idée sur le profil de l’internaute Marocain qui est d’un niveau intellectuel assez faible et que l’élite marocaine n’existe pas ou au mieux elle n’est branchée. Cette affaire met également en exergue, une fois de plus, la faillite de l’Etat marocain en général et de la justice marocaine en particulier en matière de communication et dans de le traitement de ce genre d’affaires. L’Etat semble dépassé par les nouveaux moyens de communication. Il est évident qu’il ne réalise pas le tord qu’il cause au Maroc en ne communiquant pas ou du moins en ne donnant pas sa version des choses.

Doit-on alors attendre que le roi intervienne une fois de plus pour corriger les défaillances des organes de l’Etat et gracier une autre personne condamnée à tort ou à raison ? Beaucoup voient dans ce genre de gestes une façon d’assainir l’atmosphère sociale. Mais beaucoup d’autres y voient un discrédit de la justice marocaine.