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Manipulation saharienne

novembre 21, 2010

A la suite des graves incidents survenus le 8 novembre dans le campement Gdim Izik, près de Laâyoune dans le sud marocain, le Journaliste Frédéric Pons de l’hebdomadaire français « Valeurs actuelle », vient de livrer une analyse accablante impliquant sans aucun détour la responsabilité de l’Algérie dans les évènements.

Les graves incidents survenus le 8 novembre dans le camp de réfugiés sahraouis d’Edgim Izik, près de Laâyoune (sud du Maroc), s’expliquent par une manipulation des services algériens contre le Maroc.

Déclenchée à l’occasion du 35ème anniversaire de la Marche verte (6 novembre 1975), qui avait permis au royaume de récupérer la plus grande partie de l’ancien Sahara espagnol, cette flambée de violence (deux civils et une dizaine de policiers marocains tués) traduit la volonté d’Alger de torpiller la nouvelle réunion de l’Onu sur la proposition marocaine d’autonomie, tenue le 8 novembre. Ce même jour, des militants du Polisario, le mouvement sécessionniste sahraoui, dressaient le camp contre la police. Deux agents algériens infiltrés auraient été arrêtés.

 » L’objectif des fauteurs de troubles est créer un élément de déstabilisation et de saboter les négociations, tout en faisant porter au Maroc la responsabilité de tout échec « , expliquent Hassan Alaoui, directeur du quotidien marocain Le matin du Sahara, auteur de Guerre secrète au Sahara occidental (éditions Encre d’Orient), et Charles Saint-Prot, directeur de l’Observatoire d’études géopolitiques.

Dans cette affaire, l’Algérie n’est pas sereine. Principal soutien du Polisario, aidée par de puissants relais au sein de l’internationale gauchiste et communiste européenne, elle constate que la situation lui échappe : la communauté internationale se montre de plus en plus favorable au plan marocain d’autonomie ; Rabat et ses alliés marquent aussi des points sur le front de la sécurité, face à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ; le Polisario subit enfin une grave hémorragie de militants, dont des figures historiques du combat sécessionniste. C’est le cas de Mustapha Salma Ould Sidi Mouloud, « inspecteur général de la police du Polisario », enlevé, disparu. Alger observe un silence gêné sur son sort et continue à interdire au haut-commissariat pour les Réfugiés l’accès aux camps sahraouis.

La dérive narcoterroriste du Polisario est un phénomène inquiétant pour l’avenir. Basés dans le sud algérien, équipés de 4×4 et d’armes, des « militants » du Polisario participent aux trafics clandestins entre l’Afrique noire et le Maghreb, à travers le Sahara. La France est directement concernée. Le noyau dur de ces trafiquants est en contact avec Aqmi, en guerre ouverte contre la France avec l’enlèvement d’otages français, retenus aux confins algéro-maliens. Le 2 novembre, le quotidien américain New York Post publiait une enquête de Richard Miniter faisant état de « liens établis entre 56 dirigeants politiques et militaires du Polisario et Al-Qaïda ». Jusque-là proche du Polisario, Miniter concluait ainsi son reportage : « le territoire sans loi du Sahara est en passe de devenir le prochain Afghanistan ».

Frédéric Pons
http://www.valeursactuelles.com/notre-opinion/notre-opinion/manipulation-saharienne20101118.html

Hassan II : « Tindouf faisait partie du royaume »

novembre 6, 2010

Un excellent article republié par l’hebdomadaire Jeune Afrique. C’est un article, archive pour l’histoire.

hassan II« Le drame du Maroc, c’est de n’avoir pas eu affaire à un seul colonisateur, mais à deux : les Espagnols et les Français ». Ainsi s’exprimait le roi du Maroc Hassan II, le 26 août 1985, dans une longue et exceptionnele interview accordée à notre collaborateur Hamid Barrada (J.A. n° 1299, du 27 novembre 1985). Dans ce texte, que nous re-publions aujourd’hui à l’occasion des 35 ans de la Marche verte, le roi explique la position du royaume chérifien sur le « Sahara occidental ». Un document historique.

C’est la première fois que le roi du Maroc s’entretient avec un journaliste marocain. La complaisance étant hors de propos, il ne restait qu’une familiarité commune avec l’affaire du Sahara qui s’est avérée particulièrement féconde, permettant d’aller au-delà des sentiers battus. L’entretien ne risquait-il pas toutefois de n’intéresser que les seuls initiés ? Le danger s’est trouvé écarté dans la mesure où le roi s’adressait précisément à un public profane et lointain. Ces déclarations ont été recueillies en effet pour figurer dans un film produit par l’Office national du film du Canada, qui doit s’insérer dans une série intitulée « Carnets du Maroc » du réalisateur Jacques Bensimon.

L’entretien s’est déroulé dans l’après-midi du lundi 26 août 1985 au palais de Skhirat, près de Rabat. Quelque deux heures avant le rendez-vous, l’équipe de l’ONF eut accès à l’immense salle du trône pour effectuer les préparatifs techniques. Un coin salon à droite paraissait mieux convenir à l’atmosphère décontractée, à la conversation à bâtons rompus qu’on souhaitait obtenir. A notre guise, nous procédâmes aux déplacements et déménagements devant les regards médusés des mokhazni (serviteurs du palais). Leur chef avait exigé qu’on se déchausse avant de pénétrer dans la salle du trône. Tel n’était pas l’avis de M. Abdelhaq Mrini, le directeur du protocole. S’ensuivit un docte échange entre les deux hommes dont nous n’avons pas attendu la conclusion — il faisait très chaud ! — pour obtempérer. La mise en scène achevée, quelqu’un a constaté que les deux interlocuteurs allaient fâcheusement bénéficier de deux fauteuils identiques, frappés de surcroît de l’écusson royal. On s’empressa de quérir un siège plus démocratique pour le journaliste.

Hassan II nous accueillit dans la cour couverte de tentures et donnant sur l’immensité de l’océan. En chemise rayée, pantalon rouille, sandales de toile, il « tomba » la veste assortie et nous demanda si son costume convenait : « C’est l’été, n’est- ce pas ? » Puis, sans plus tarder : « Allons-y ! » A l’intention de la cour, une vingtaine de dignitaires et de familiers, il lança sur un ton enjoué : « Vous pouvez assister à condition qu’on ne vous entende pas ! » Suivant le souverain, la cour s’ébranla pour s’asseoir des deux côtés d’une longue table installée à gauche. L’atmosphère n’était ni compassée ni solennelle. « Silence, on tourne ! » lança quelqu’un. Le roi taquina son conseiller, Ahmed Réda Guédira, qui toussait : « Tu fumes trop ! »

J’avais assisté à plusieurs conférences de presse de Hassan II. Mais rien ne remplace la perception débarrassée des aléas — et des parasites — de la distance. Entre le roi que j’avais devant moi et celui que j’imaginais, la disparité est astronomique. Il y aurait beaucoup à dire. On me permettra de m’en tenir à une chose. Ne serait-ce que parce qu’elle jure avec les contes et légendes qui circulent sur lui. Si Hassan II sacrifie à la tyrannie, c’est d’abord à celle qu’il exerce sans partage sur lui-même.
Visiblement, cet homme frêle et courtois s’assigne à chaque instant de gouverner son royaume intérieur pour être en mesure — pour mériter ? — de gou­verner l’autre. Pour tout dire, le vingt et unième représentant de la dynastie alaouite tient davantage du sage chinois que du prince arabe.

En soulignant ces traits qui sautent aux yeux, le souci de la vérité n’est pas seul en cause. Il y va aussi, me semble-t-il, des causes profondes du conflit du Sahara, lesquelles ont une connotation psychologique certaine.

Les voisins qui sont censés se connaître s’affrontent et s’étripent, parce qu’ils tournent le dos à leurs vérités respectives. Or Hassan II n’hésite pas à dire que le président Chadli « aime les Marocains ».

Il le tient visiblement en haute estime et rien ne le fera démordre de cette opinion qui s’assimile à une option stratégique. A l’en croire, le roi n’a pas désespéré de trouver un terrain d’entente avec Chadli.

Deux révélations donnent cependant la mesure de sa propre marge de manœuvre. Il confie en termes camuséens qu’il avait décidé, au cas où la Marche verte eût échoué, d’abdiquer. En second lieu, il lève le voile sur la parade du Maroc à la stratégie d’usure élaborée par l’adversaire. La guerre du Sahara s’est avérée une bénédiction du ciel. Disposant de l’armée « la plus opérationnelle en matière de guerre du désert », il entend jouer un rôle, si besoin est, dans cette région explosive et fragile à souhait.

Mais Hassan II n’est pas le shah d’Iran. Ses propos sur une éventuelle intervention des FAR (Forces armées royales) dans le Golfe nous paraissent à la fois comminatoires et didactiques à l’adresse de tous ceux qui croient que le conflit du Sahara, en s’éternisant, va entraîner l’effondrement de l’économie du royaume, et du royaume lui-même par la même occasion. Le roi signifie qu’il existe, à la réflexion, un bon usage de ce conflit — non seulement le Maroc s’en accommode fort bien, mais il peut en tirer profit. Donc disponibilité pour la paix avec l’Algérie telle qu’elle est si elle veut bien se convertir à une politique de bon voisinage, mais aussi option, s’il le faut, sur une guerre interminable qui révèle ses propres vertus.

Le roi met deux fers au feu afin d’être dans les meilleures conditions pour traiter. L’avantage c’est qu’on sait à quoi s’en tenir et l’on se prend à rêver : si Chadli pouvait, lui aussi, parler à cœur ouvert !


hassan IIUne du J.A. n° 1299, paru le 27 novembre 1985.
© J.A.

Jeune Afrique : Majesté, si vous aviez à raconter l’affaire du Sahara à un enfant, disons à votre petit-fils, comment vous y prendriez-vous ?

Hassan II : Une question difficile, ne serait-ce que parce que je n’ai pas encore de petit-fils ? En vérité, l’affaire du Sahara était d’une limpidité telle que, pour l’adversaire, il s’agissait de miner le chemin marocain de contre-vérités et de désinformation. Or, de nos jours, l’opinion publique, avec le matraquage constant de l’audiovisuel ou de la presse écrite, est plus sensible à ce qui n’est pas clair qu’à ce qui l’est. Alors, je vais essayer d’être le plus clair et le plus concis possible.

Le Maroc, de tout temps, n’a jamais réclamé que ce qui lui appartient. Ainsi Tindouf, par exemple, faisait partie intégrante du territoire marocain jusqu’au début des années cinquante, puisque, lors des cérémonies de l’Aïd El-Kébir et de l’Aïd Seghir, le pacha de cette ville — je l’ai vu de mes propres yeux — venait faire allégeance devant mon père. Mais, lorsque nous sommes partis en exil, le 20 août 1953, Tindouf, entre autres, nous a été enlevée pour être rattachée à l’Algérie. C’est que la France pensait que l’Algérie ne serait jamais indépendante. Après notre retour d’exil, l’ambassadeur de France au Maroc, M. Alexandre Parodi, est venu demander à mon père en substance : « Le général de Gaulle vous propose de constituer une commission pour discuter des frontières marocaines. » Mon père a répondu : « Il n’en est pas question. Je suis sûr, ajouta-t-il, que lorsque l’Algérie sera indépendante ses dirigeants nous rendront justice et accepteront d’en discuter avec nous. » Les choses se sont passées autrement : non seulement nos voisins et frères algériens n’ont rien fait pour discuter des frontières orientales, mais, à la première occasion, ils ont essayé d’empêcher le Maroc de récupérer son Sahara.

Si je parlais à mon petit-fils, je lui dirais tout simplement que ce Sahara a toujours été lié au Maroc par les liens de l’allégeance et que, chez nous, souveraineté et allégeance (beïa) sont une seule et même chose. Sans remonter au déluge, Moulay Hassan, mon arrière-grand-père, est allé jusqu’à Oued Noun. Il n’a pas continué plus au sud, mais il y a envoyé son chambellan porter les traitements mensuels aux hauts fonctionnaires de la région. Moulay Abdelaziz a chargé le même chambellan, qui a chevauché les deux règnes et vivait au palais jusqu’après la mort de mon père, de cette mission.

En vérité, le drame du Maroc, c’est d’avoir eu affaire à deux colonisateurs : les Espagnols et les Français. Si nous avions eu la chance de n’en avoir qu’un seul, nous aurions soldé de tout compte notre affaire du nord au sud. Malheureusement, il nous a fallu négocier le remembrement du Maroc morceau par morceau. Après la rétrocession par l’Espagne de Tarfaya [10 avril 1958] puis de Sidi Ifni [30 juin 1969], il ne restait que le gros morceau du Sahara. Nous avons introduit la question aux Nations unies au lendemain de notre indépendance. A l’époque, il n’y avait ni Algérie ni Mauritanie, et c’est plus tard que la notion de « partie concernée » ou « intéressée » est apparue. Le résultat est que ce qui était clair, limpide, ce qui aurait dû être réglé bilatéralement, comme le reste, entre le Maroc et l’Espagne est devenu comme d’un coup de baguette magique, je dirais maléfique, un sujet dont on fait un cas d’expansionnisme, de massacre, de génocide.

marche vertePendant la Marche verte, le 6 novembre 1975.
© Graeme-Baker / SIPA

Majesté, puisque c’est l’intrusion de l’Algérie qui est à l’origine de la complication de l’affaire du Sahara, pourquoi le Maroc n’a-t-il pas saisi l’occasion de l’accord frontalier de 1972 pour lier la question des frontiè­res à l’affaire du Sahara, de manière à amener le voisin à tenir ses engagements ? Et, lors de la guerre des sables en 1963, l’armée marocaine se trouvait devant Tindouf, pourquoi avez-vous ordonné au général Driss Ben Omar de battre en retraite ?

Je commencerai par la deuxième question. J’estimais qu’il ne fallait pas créer entre les deux pays un point de fixation morbide. En second lieu, Tindouf en elle-même ne m’intéresse pas. Elle est intéressante sentimentalement, mais elle ne constitue ni un nœud de voies stratégiques, ni un lieu de passage obligé. Vous me direz qu’elle contient du fer et c’est vrai. Mais ce fer est piégé : s’il ne passe pas par le Maroc, il ne peut passer nulle part. Enfin, aucune ville, marocaine ou algérienne, ne mérite une guerre. Je vous dirai plus, et qui est totalement inédit : je n’ai pas arrêté le seul général Driss, mais également le général Kettani. Il m’a dit : « Si Votre Majesté veut faire la prière à Oran vendredi prochain, nous y serons. » J’ai réponde : « Non, ce n’est pas la peine, puisque nous ne pouvons pas y rester ! » Non, vraiment, ce n’était pas la peine de creuser la tombe d’une amitié qui paraissait à l’abri de toute contingence.

Est-ce qu’un président algérien, dans une situation comparable, mais inverse (l’ar­mée algérienne devant Oujda), aurait donné le même ordre à ses généraux ?

Ce que je puis vous dire, c’est que les autorités algériennes ont osé mettre à la porte de l’Algérie, en 1975, quarante-cinq mille Marocains, dans des conditions effroyables. Voilà ce que les Algériens ont fait sur le plan civil ; sur le plan militaire, je ne sais pas.
Revenons à 1972…

En 1972, nous n’avions aucun problème avec l’Algérie. La position de Boumedienne était claire : il n’avait aucune prétention sur le Sahara. La Mauritanie faisait tout pour ne pas avoir de frontière commune avec le Maroc. Et cette hantise a habité les dirigeants mauritaniens jusqu’à la fameuse rencontre entre les présidents Ould Daddah et Boumedienne à Colomb Béchar [// novembre 1975]. Le président Boumedienne a cru bon d’injurier le président Ould Daddah. C’est à partir de ce moment que, de leur côté, le Maroc et la Mauritanie ont vécu plus qu’intimement. Auparavant, en octobre 1974, au cours du sommet arabe de Rabat, l’affaire du Sahara était venue sur le tapis et le président Boumedienne avait déclaré au nom de son pays : « Pour moi, il n’y a pas de problème au Sahara ; l’Algérie considère que cette affaire est purement maroco-mauritanienne, ni plus, ni moins. » Mais, par la suite, les dirigeants algériens ont sorti la thèse de l’autodétermination. « Les Sahraouis, soutenaient-ils, sont nos voisins. Nous ne pouvons pas parler du droit à l’autodétermination du peuple vietnamien, qui se trouve à dix mille kilomètres, et ne pas le défendre à nos frontières. » Tout est parti de là. C’est l’escroquerie du siècle !

Est-ce que l’affaire du Sahara n’a pas des soubassements psychologiques ?

Si c’était le cas, cela prouverait que nos voisins ne sont pas arrivés à la maturité voulue. S’il s’agissait d’une affaire psychologique, ce serait dramatique et très inquiétant pour nous. Je pense plutôt que les difficultés viennent de ce que nous devons apprendre à vivre ensemble. Jusqu’à présent Marocains et Algériens vivaient ensemble mais, si vous voulez, selon les lois de la nature, de l’histoire, du voisinage. Sans plus. Il y avait d’un côté un État marocain et de l’autre l’Algérie qui se trouvait sous la tutelle de la Sublime Porte et par la suite est passée sous l’occupation française. À la recherche d’un lieu musulman pour, justement, garder sa personnalité, le peuple algérien avait naturellement tendance à se rapprocher du Maroc. Aujourd’hui nous avons affaire, non plus au peuple algérien, mais aux autorités algériennes. Les choses changent…

 

marche vertePour Hassan II, la Marche verte était une idée d’« ancien manifestant. »
© Graeme-Baker / SIPA

Le Maroc a eu des contacts, des pourparlers ou des négociations avec l’Algérie. Sur quoi les choses ont-elles achoppé ?

Mais sur un point précis : le gouvernement algérien devait se sortir de la contradiction ou il s’était mis. Il avait affirmé qu’il n’avait pas de prétention sur le Sahara, qu’il ne faisait que réclamer l’application du principe d’autodétermination. Lorsque le Maroc a proclamé son accord sur l’autodétermination, les Algériens se sont retrouvés en porte-à faux, piégés par la réalité. Qu’ils laissent faire le référendum et l’affaire est perdue pour eux. Qu’ils le refusent et les voilà en contradiction avec eux-mêmes.

Ne croyez-vous pas que l’infiltration au Maroc de commandos « terroristes » en juillet der nier marque un changement de la stratégie algérienne ?

Ce n’est pas la première fois que les Algériens agissent ainsi ; ils l’ont déjà fait en 1973, et ce malgré nos bonnes dispositions à leur égard. En effet, en 1972, nous avons signé ensemble le traité sur les frontières qui attendait seulement d’être ratifié. Il n’y a avait pas de parlement à l’époque et j’avais dit au président Boumedienne : « Je peux ratifier le traité, constitutionnellement j’en ai les pouvoirs, mais je pense qu’il vaut mieux que vous ne passiez pas par la fenêtre, mais pas la grande porte. Les élections auront lieu en 1973 et je ferai ratifier le traité sur les frontières par le parlement. Ainsi vous serez à l’abri de toute contestation. » Or voilà que le 4 mars 1973, des commandos infiltrés à partir de l’Algérie parviennent jusqu’à Moulay Bouazza dans le Moyen-Atlas. Il a fallu envoyer contre eux des forces assez importantes. Il s’est avéré par la suite que certains services algériens avaient tout planifié et exécuté.

La grande différence entre les deux opérations est qu’en 1973 l’onjectif des commandos était de créer des désordres nominalement connus : nous savions qui allait tirer sur qui. Tandis que cette fois, il s’agissait de terrorisme dans ce qu’il a de plus affreux. On place une bombe dans un sac de papier ; avec un système de télécommande à distance, on la fait exploser sur une plage, un stade d’athlétisme ou de football, ou encore dans un cinéma, puis on se sauve comme un lâche en laissant des dizaines de victimes. Cela défie toute morale et même la simple virilité. Le Maroc n’a mis en cause que la Direction de la Sécurité militaire (S.M.), mais il est certain que ce n’est pas n’importe quel organisme et je souhaite que le président Bendjedid tire les conclusions qui s’imposent.

Je suis confiant parce que, quand il a été, pendant plus de dix ans, commandant de la région militaire d’Oran et qu’il avait sous son autorité la zone frontalière. Je peux le dire, le président Chadli aime les Marocains. Nous n’avons jamais eu de problème avec lui, même lorsque les choses allaient mal entre Alger et Rabat. Donc, j’espère que le président Bendjedid réagira afin que de telles choses ne se reproduisent pas. Sinon nous serons conduits à renvoyer la balle à l’Algérie. Nous pourrions le faire aisément, ce n’est pas le recrutement qui manque, mais je n’ai pas envie de jouer au tennis dans ce domaine !

Peut-on savoir qui est l’auteur des murs ?

Il n’y a pas d’auteur particulier. Nous nous sommes rendus compte que le Sahara n’était pas le Vietnam, par exemple. On peut passer partout, il n’y a guère de points de passage obligés. Il fallait donc mieux, dès qu’une localité était occupée et sécurisée, créer des points de passage obligés. Par la suite, constatant que ce que nous avons réalisé ainsi d’une façon empirique sur certaines zones donnait de bons résultats, nous avons envisagé l’édification des murs, englobant des points stratégiques particuliers. Le plus difficile a été de sécuriser le Sakiat Al-Hamra. C’est un fromage de gruyère avec des sommets qui vont jusqu’à 1200 mètres où l’on peut cacher des divisions entières. Après le mur de la Sakiat Al-Hamra, nous nous sommes occupés de la Hamada, avant de redescendre vers ce qui est plus facile.

Cette guerre n’est-elle pas une bénédiction dans la mesure où le Maroc, doté d’une armée désormais puissante, pourrait peser sur les affaires de la région ?

Je peux dire sans forfanterie que, sur le plan de la guerre du désert (je ne parle pas de la guerre dans les Ardennes ou dans les plaines européennes), l’armée marocaine est, sinon la meilleure, du moins la seule au monde vraiment opérationnelle.

Même si on la comparaît à l’armée israélienne ?

L’armée israélienne a fait des guerres du désert qui ont duré la plupart du temps huit, dix jours sur des distances courtes avec des objectifs ponctuels. Sans lui enlever ses mérites militaires, elle n’a jamais eu à conquérir, occuper et sécuriser l’étendue et la nature des territoires que nous sécurisons. La comparaison n’est pas fondée.

marche verteQuelque 350 000 Marocains participent à la Marche verte.
© Patrick Frilet / SIPA

Qu’auriez-vous fait en cas d’échec de la Marche verte qui, elle, si je ne me trompe, est votre œuvre ?

D’abord, la Marche verte n’est pas l’idée de Hassan II chef d’Etat, mais de Hassan II ancien manifestant, du jeune homme qui, en 1944, a manifesté comme tous ceux de sa génération. En 1975, j’ai pensé : pourquoi est-ce qu’on ne pourrait pas faire à nouveau une manif, une grande manif à l’échelle de 350 000 habitants ? Puis, je me suis dit : pourquoi exposer les gens à la mort ? Envoyons-les avec le Coran et le drapeau. Quel est le fou sanguinaire qui oserait tirer sur des hommes et des femmes désarmés ? Naturellement, j’avais envisagé l’échec et je dois vous dire que le jour où l’on m’a annoncé la réussite, que les marcheurs étaient rentrés du Sud, j’ai regardé mon pays d’un tout autre regard. J’avais l’impression d’y renaître, car, si la Marche verte avait échoué, j’avais décidé de le quitter…

Vous dites bien, le quitter ?

Oui, le quitter, car je n’aurais plus eu le courage moral de regarder en face le moindre de mes sujets et de mes compatriotes. Quand j’en parle aujourd’hui, je suis encore ému, car je sais ce que c’est que de quitter son pays. J’en ai été privé deux ans et demi, et vous connaissez l’attachement païen que j’ai pour ma terre, pour mon ciel, pour l’eau, pour les plantes de mon pays. J’avais pourtant envisagé de partir. Comme le prévoit la Constitution, le pouvoir aurait été dévolu au Conseil de régence durant la minorité du prince héritier. Mais, grâce à Dieu, nous sommes là.

Majesté, la Marche verte, les murs, tout cela a quelque chose de chinois… Vous faites la guerre sans oublier la paix…

Oui, dans l’Antiquité, il y avait une façon chez les Chinois de faire la guerre sans la faire. Il arrivait, comme le raconte Sun Tzu [dans l’Art de la guerre], que, deux grandes armées se trouvant face à face, les rois ou les empereurs en conflit faisaient l’économie de la guerre. Ils se rencontraient sous la tente, convoquaient leurs généraux et se contentaient de simuler les combats. « Bon, disait l’un, vous avez vos archers sur cette colline, moi j’ai mon infanterie ici ; vous avez votre cavalerie à droite, moi, mes chars à tel endroit. Alors, si je fais ce mouvement, qu’allez-vous faire ? — Dans ce cas, j’agirais de la sorte. — Mais si vous me contournez par mon aile droite, je peux foncer sur votre centre… » Et ainsi de suite. Ils faisaient la guerre comme avec des soldats de plomb. Lorsque l’un des deux l’avait emporté, le vainqueur était reconnu comme tel, le vaincu acceptait ses lois et la « guerre » prenait fin sans qu’une seule goutte de sang ait été versée…

marche verteLe principe de la Marche verte : lever une armée pacifique.
© Patrick Frilet / SIPA

Pourquoi n’avez-vous pas agi de la sorte avec Chadli quand vous l’avez rencontré le 26 février 1983 ?

Parce que jamais l’Algérie n’a considéré que c’était elle qui combattait !

Mais les Chinois sont très didactiques. N’y a-t-il pas moyen d’enseigner la paix à l’Algérie ?

Les Chinois sont les Chinois, les Nord-Africains sont les Nord-Africains, on n’y changera rien.

Le traité que vous avez signé avec le colonel Kaddafi, au mois d’août 1984, n’est-il pas surtout favorable à la Libye : Kaddafi a cessé son aide au Polisario qui, de toute façon, semblait perdant en échange d’une crédibilité dont il n’aurait peut-être jamais rêvé ?

Vous savez, lorsqu’on constitue une société commerciale ou un holding, on ne peut pas savoir si ce sera une affaire florissante avant deux ou trois ans. A plus forte raison lorsqu’il s’agit de deux États qui étaient aux antipodes l’un de l’autre, qui avaient à réapprendre à dialoguer, à échanger des idées, des biens et des personnes. Il est encore trop tôt pour faire le bilan du traité d’Oujda. En ce qui me concerne, si je m’étais rendu compte, au cours de cette année, que l’accord ne servait pas mon pays, je ne l’aurais pas renié, mais j’aurais demandé à l’amender.

Des particpants à la Marche verte brandissent les drapeaux marocains et américains.
© Patrick Frilet / SIPA

Le conflit du Sahara est-il un conflit local, régional ou un conflit ayant des tendances idéologiques et des dimensions planétaires ?

Ecoutez, je vais vous donner un point de vue géostratégique. Prenons les côtes de l’Afrique. Vous avez peut-être remarqué qu’il y a des problèmes partout où i! y a de longues côtes : Somalie, Angola, ou encore Maroc avec le Sahara. En règle générale, dès qu’il y a des milliers de kilomètres de côtes, il y a des problèmes. De là à dire que les Grands sont intéressés, il n’y a qu’un pas. De là à penser que les conflits ne font que refléter les convoitises suscitées par les richesses halieutiques entre riverains, il n’y a qu’un pas. En réalité, selon l’état d’esprit, l’humeur ou la spécialité de l’analyste, on a affaire à un conflit bilatéral, régional ou impliquant les deux Grands. Du reste, je poserai la question aux deux Grands, puisque je suis mandaté par le sommet arabe pour leur présenter la situation du monde arabe, ses volontés, ses espérances. Et je profiterai d’une parenthèse pour les interroger, comme cela, face à face, sur le problème du Sahara…

http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20101106114203/hassan-ii-tindouf-faisait-partie-du-royaume.html

L’algérie persécute les défenseurs des droits de l’homme sur son territoire et en devient l’avocat au maroc (diplomate)

avril 5, 2010

Genève,16/03/10- L’Algérie harcèle et persécute les défenseurs des droits de l’homme sur son territoire et en devient l’avocat au Maroc, a indiqué, mardi, l’ambassadeur représentant permanent du Maroc auprès de l’Office des Nations unies à Genève, M. Omar Hilale, devant la 13ème session du Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU.

Il a indiqué que le pacte international sur les droits civils et politiques que l’ambassadeur algérien a invoqué contre le Maroc est, malheureusement, violé au quotidien par son pays.

M. Hilale qui répondait à l’ambassadeur algérien, qui avait critiqué la situation des défenseurs des droits de l’homme dans les provinces du sud du Maroc, a fait savoir que les défenseurs des droits de l’Homme auxquels le diplomate algérien a fait allusion sont des agents que son pays manipule et finance et dont les chancelleries algériennes organisent les activités à travers le monde.

L’ambassadeur algérien sait très bien que ces gens ont toujours profité de leur marocanité, des droits et de la démocratie que leur garantit le Maroc, a expliqué le diplomate marocain, ajoutant que ces personnes ont pu se déplacer librement à l’étranger et rentrer dans le Royaume en toute quiétude et sans être inquiétées, tant que leurs activités restaient dans les normes internationales en vigueur et en conformité avec la loi marocaine. Cependant, a-t-il fait remarquer, il a été établi que ces individus complotaient avec une puissance étrangère que l’ambassadeur algérien connaît très bien, dans le but d’une déstabilisation programmée et progressive de l’ordre et de la sécurité au Maroc. Il a rappelé à ce propos que la législation marocaine, à l’instar des autres pays, prévoit des mesures adéquates et conformes aux standards internationaux pour sanctionner les actes d’intelligence de tout citoyen marocain avec les puissances et les organisations étrangères. Dès lors, a-t-il dit, ils ne sont plus des défenseurs des droits de l’Homme, mais des activistes politiques qui doivent répondre de leurs actes devant la Justice.

M. Hilale a soutenu que les authentiques défenseurs marocains des droits de l’Homme exercent librement leur mission et interpellent leur pays sans jamais être inquiétés, car, a-t-il dit, le Maroc est un pays de droit qui assume pleinement ses choix démocratiques irréversibles, ce qui n’est nullement le cas de l’Algérie.

Il a indiqué que la Communauté internationale n’est pas dupe ni sur la situation des droits de l’homme en Algérie, ni sur les motifs réels de sa campagne d’instrumentalisation des droits de l’homme au Maroc, notamment dans le contexte de la dynamique de négociations enclenchée grâce à l’initiative marocaine d’autonomie pour la région du Sahara marocain.

Après avoir invité l’ambassadeur algérien à se préoccuper, en premier lieu, du traitement que son pays fait subir à ses propres défenseurs des droits de l’Homme, M. Hilale a étayé ses propos en citant des passages d’une lettre que M. Hocine Ait Ahmed, président du Front des Forces Socialistes, avait adressée, le 9 décembre 2009, au Haut Commissaire aux Droits de l’Homme, Mme Pillay.

Dans cette lettre, M. Ait Ahmed a notamment souligné que le souci qui motive la campagne que le pouvoir algérien mène en faveur des défenseurs des droits de l’Homme au Maroc, ne s’explique nullement par le respect des droits des peuples et particulièrement le respect de la personne humaine et la protection des défenseurs des Droits de l’Homme. Il a aussi indiqué que « depuis des années, le peuple algérien est empêché de s’exprimer librement », jugeant « scandaleux le traitement réservé en Algérie aux militants pour la démocratie et aux défenseurs des Droits de l’Homme », a précisé M. Hilale.

Il a noté que le témoignage de M. Ait Ahmed constitue un véritable réquisitoire par un leader politique algérien du discours tendancieux de l’Algérie sur le Maroc et un appel au gouvernement algérien à défendre et à promouvoir les droits de l’homme en Algérie.

L’ambassadeur marocain s’est, en outre, référé au rapport du réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme sur « la liberté d’association dans la région euro-méditerranéenne », de décembre 2009, qui avait indiqué que « les défenseurs des droits de l’Homme continuent de faire régulièrement l’objet de harcèlement administratif ou judiciaire » en Algérie.

Il a aussi fait savoir que plusieurs ONG ainsi que la presse algérienne et internationale ne cessent de dénoncer le traitement dégradant que l’Algérie réserve aux leaders politiques Kabyles tant en Algérie que lors de leurs déplacements à l’étranger pour défendre leurs aspirations autonomistes. Certains d’entre eux sont même interdits de retour en Algérie, devenant ainsi des apatrides de facto, a-t-il dit.

source: MAP

Sahara : il faut revisiter l’histoire

avril 5, 2010

Il faudra sans doute beaucoup de détermination et de persévérance à Miguel Angel Moratinos, ministre espagnol des Affaires étrangères pour mener une nouvelle tentative de médiation entre Alger et Rabat lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays 5+5 prévue à Malte le 15 avril prochain .

Le climat de tension savamment orchestré par la diplomatie algérienne connaît en effet un pic jamais atteint jusqu’ici, qui n’augure d’aucun résultat pour cette louable initiative, à l’exception d’une montée en puissance d’une animosité qui confine à une haine implacable, au point où certaines chancelleries, au vu du surarmement de notre voisin, craignent tout simplement un conflit armé.

L’agitation diplomatique algérienne, a pris des dimensions planétaires avec les comités de soutiens de jeunes, de femmes, de militants de tout acabit s’élargissant à l’échelle de l’Afrique, de l’Amérique Latine et bien sur de l’Europe où Alger par tout les moyens,tente de miner le statut avancé du Maroc, et les progrès enregistrés avec la proposition d’autonomie, en faisant pression auprès des députés européens sur les questions de la pêche, des droits de l’homme, de la redistribution des richesses…Tout observateur analysant les coups de boutoirs d’Alger remarquera que sa diplomatie ne prend même plus la peine d’utiliser des intermédiaires et agit directement de front, ramenant ce conflit à sa juste mesure, un conflit entre le régime algérien et le Maroc.

Qu’attendre dés lors de cette énième initiative de médiation, cette fois venant de Madrid ? Comment convaincre le président Bouteflika au « soir de sa vie » que sa politique mènera rapidement à la création d’un Kurdistan dans la région ? Que le coût de cette impasse qui pèse très lourdement sur les peuples du Maghreb mais aussi sur les pays de l’Europe du Sud risque également de plomber durablement cette région avec une résurgence de turbulences dans tous les pays des rebelles touaregs, sahraouis et autre membres de telles ou telles factions dans le sud de l’Algérie, au Mali, au Niger, au Tchad en Mauritanie… où la question saharienne déborde des frontières et où les groupes armés locaux allument les feux et les contre feux ?

Selon ses ambitions, le régime algérien a réussi jusque là à interférer dans les problèmes de la région et tente de réaliser des équilibres géographique et politique toujours selon son plan d’hégémonie, bénéficiant en cela des actions de l’ancien projet français de l’OCRS .Un projet qui à l’époque du colonialisme français, devait séparer l’Algérie de son Sahara n’eut été la solidarité de feu S.M. Mohammed V pour qui la solidarité avec le peuple algérien primait sur toute considération fut elle dans son intérêt. Un évènement récent qui risquerait de passer inaperçu prend aujourd’hui toute son importance. L’arrangement technique sur la duplication des archives conservées dans les Centres d’archives françaises, signé la semaine dernière à Rabat, entre le Haut commissariat aux anciens résistants et anciens membres de l’armée de libération et le secrétariat d’Etat français aux anciens combattants pourrait aider à comprendre ce passé récent mais aussi le présent.

Les archives sous forme de microfilms retraçant l’histoire franco-marocaine constituées de 6.153 vues sont mises à la disposition des chercheurs nationaux et Mr Ktiri a déclaré que « Le Haut commissariat avait dépêché, à cinq reprises, un groupe de chercheurs spécialisés qui a pu sélectionner et choisir quelque 520.390 pages/documents sur les 20 millions de documents conservés dans les Centres d’archives françaises ». La déclaration de l’ambassadeur de France mérite également que l’on s’y attarde .Pour M. Bruno Joubert, « Partager la mémoire, requiert l’appréhension de l’histoire qui représente un facteur de progrès pour l’avenir, a-t-il estimé, relevant qu’un tel partage est de nature à contribuer à faire face aux menaces qui guettent la liberté et les valeurs communes ». Cette histoire récente nous rappelle aussi deux chiffres clés avancés par l’administration coloniale et les historiens qui donnent à réfléchir : en 1920, la superficie des départements français d’Algérie était estimé à 575 000km2.A son indépendance en 1962, elle compte 2 400 000km2, la France y ayant rattaché la plus grande partie de l’Afrique saharienne française et du Maroc saharien oriental .Des chiffres que M. Moratinos devrait méditer en relisant l’histoire récente de notre région.

source : http://www.temoust.org/sahara-il-faut-revisiter-l,14186

Bouteflika ruine l’Algérie pour amoindrir le Maroc

janvier 11, 2010

Après plusieurs semaines de léthargie, Abdelaziz Bouteflika est parti en Espagne mettre encore plus à mal le statut géopolitique et les intérêts de l’Algérie pour satisfaire son ego personnel. Vestige encore vivant de la politique de guerre froide, Bouteflika continue de ligoter la diplomatie algérienne à sa phobie de la monarchie marocaine.

Dans la déclaration commune des travaux de Madrid du 7 janvier, on ne retient dans le verbiage diplomatique qu’un seul marchandage. Le bradage du gaz algérien contre une simple promesse de soutenir «le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui».

Pour arracher cette déclaration de principe qui ne coûte rien à Zapatero, Bouteflika a posé sur la table des négociations le gazoduc sous-marin Medgaz classé par l’Espagne comme projet prioritaire. Alors que les travaux sont pratiquement achevés, la mise en service du projet reste tributaire de deux dossiers lourds: le prix du gaz et la part qui revient à Sonatrach dans la commercialisation en Espagne et en Europe des 8 à 16 milliards de m3/an qui transiteront à terme par ce gazoduc. (1)

Même le lourd contentieux de Gassi Touil, qui coûte à l’Algérie un retard considérable, a été pardonné et balayé d’un revers de main. On rappelle que ce mégaprojet gazier intégré GNL, initialement confié aux firmes espagnoles Repsol et Gaz Natural, avait été saboté. Les espagnols voulaient retarder sa réalisation tant que le gazoduc Medgaz ne serait pas opérationnel et les contrats de livraison sécurisés.

On ne sait toujours pas quelle est la part du gaz dans les recettes d’exportation d’hydrocarbures. L’indexation de son prix sur celui du pétrole cause à l’Algérie des fluctuations perturbantes et des pertes énormes que personne n’a pu chiffrer, en raison de l’opacité de gestion de Sonatrach, le secret des contrats commerciaux et l’absence totale de débat sur ce sujet sensible. Bouteflika et son ministre de l’énergie Chakib Khellil ont même contrarié la proposition russo-iranienne de créer une OPEP du gaz pour définir et défendre une stratégie de prix. (2)

José Luis Rodriguez Zapatero, qui entame son semestre à la présidence de l’UE, est placé en première ligne pour négocier au mieux les intérêts gaziers de l’Europe. Il est donc prêt à signer des deux mains n’importe quelle déclaration que lui demandera Bouteflika, même sur l’autodétermination des aborigènes d’Australie ou des pingouins de l’Antarctique.

Comme le cadeau gazier ne suffit pas, la déclaration de principe relève que «l’Espagne est devenue l’un des investisseur de référence en Algérie et souhaite stimuler davantage les investissements espagnols dans des secteurs moteurs de développement en Algérie». Bouteflika souhaite que «les entreprises espagnoles participent et s’impliquent dans le vaste programme national algérien d’équipements publics 2010-2014», c’est-à-dire jusqu’à la fin de son mandat. Le peu d’hommes politiques et de parlementaires conscients en Algérie se doivent de dénoncer le bradage du gaz et des intérêts algériens dans une opacité totale, et remettre en cause ce que cache cette déclaration de Madrid.

En fait, Bouteflika n’a qu’une seule obsession: que l’ex-colonisateur espagnol et voisin maghrébin l’accompagne dans le combat de sa vie contre son pays natal pour que le Maroc continue à souffrir.

Il est tellement honteux de son origine marocaine qu’il a effacé son lieu de naissance, Oujda, qui était auparavant mentionné dans sa biographie sur le site de la présidence algérienne (www.elmouradia.dz).

Il a lié la politique énergétique de l’Algérie au destin de quelques enturbannés d’un Polisario fantôme présidé depuis 33 ans par un marocain, et dont la plupart des membres fondateurs ont réintégré le royaume.

Saâd Lounès

Maroc-Algérie:Le clan d’Oujda a perdu la bataille du Sahara marocain

novembre 12, 2009

Par Saâd Lounès
Journaliste algérien
http://www.pressealgerie.com/lequotidiendalgerie.htm

Le dernier refoulement d’un avocat et de journalistes marocains à l’aéroport d’Alger est une grave erreur diplomatique. Il ne reste plus à Bouteflika et au clan d’Oujda que des bavures policières pour exprimer leur vision autoritariste sur la question du Sahara Occidental.

Ce conflit inutile engagé à la hussarde par Boumediene, après le coup d’Etat manqué et la mort de son ami le général Mohamed Oufkir en août 1972, n’a en fait été qu’un prétexte de déstabilisation de la monarchie alaouite. (1)

Face à l’adversité du pouvoir socialiste algérien et ses alliés de l’opposition marocaine, Hassan II avait réussi à consolider son trône. Après 10 ans de règne, Mohamed VI a fait du Maroc un «modèle à suivre pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient» selon les termes de la secrétaire d’Etat Hillary Clinton au Forum de l’Avenir à Marrakech devant un parterre de diplomates du monde entier.

Le Maroc n’en finit plus d’engranger les bénéfices d’une nouvelle stratégie pragmatique et conquérante initiée depuis le lancement des négociations directes avec le Front Polisario sous l’égide de l’ONU en juin 2007.

Paradoxalement, c’est en utilisant les méthodes algériennes que le Maroc a pu avancer de manière spectaculaire dans la résolution du conflit à son avantage par une gestion efficace du renseignement et l’intégration des clientèles sahraouies dans le jeu politique national.

La bataille du renseignement

En nommant son camarade de classe et ami d’enfance Mohamed Yassine Mansouri à la tête de la DGED, le roi a changé la donne qui présidait jusqu’alors au sein des services secrets marocains. Civil et technocrate, Mansouri suit une feuille de route stratégique d’action en avançant une à une ses pièces sur l’échiquier sahraoui pour mettre en échec la partie algérienne, la seule qui s’oppose à un règlement définitif du conflit.

Mansouri agit sur plusieurs cibles pour désosser le Polisario et retourner contre l’Algérie ses principaux atouts qu’étaient le Front et les camps de Tindouf. En participant à toutes les phases de négociation de Manhasset, Mansouri effectue un travail de sape pour retourner les dirigeants sahraouis.

Il a également réussi un coup de maître surprenant en envoyant pour la première fois dans les camps de Tindouf une mission d’information et de renseignement sous couverture de presse. Un journaliste et un photographe d’un hebdomadaire marocain ont pénétré dans les camps de Tindouf et publié un reportage en été 2008. (2)

Ils y ont aussi recueilli une somme de renseignements et de photos très utiles pour dénoncer auprès des instances onusiennes les conditions de «séquestration» des sahraouis par les autorités algériennes.

Conforté par le soutien de tous les pays arabes, parachevé dernièrement par la reconnaissance libyenne de la marocanité du Sahara, Mansouri utilise à fond la carte maîtresse mauritanienne. Outré par le mépris que lui a manifesté Bouteflika, le nouveau président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz se dévoue pour la cause marocaine et œuvre à la reddition des chefs du Polisario en recevant très souvent le patron de la DGED.

Sur le plan intérieur, de plus en plus de sahraouis sont intégrés sur la scène politique nationale. Les stratèges marocains ont dernièrement réussi un coup de maître en portant à la présidence de la Chambre des Conseillers, un médecin sahraoui Mohamed Cheikh Biadillah, dont le propre frère est Brahim Ahmed Mahmoud Biadillah, dit «Gregou», responsable de la 2ème région militaire et ancien chef de la sécurité militaire du Polisario, qui figure en bonne place sur une liste de tortionnaires du Polisario. (3)

C’est un signal très fort auquel ne sont pas insensibles les notables sahraouis qui y voient un appel à une course à toutes les investitures dans le train du dynamisme politico-économique marocain. Entre la prospérité du destin national de Mohamed Cheikh, et l’éternelle attente l’arme au pied du «Désert des Tartares» de Gregou, le choix est vite fait.

D’autant que le projet royal d’Autonomie prévoit une amnistie pour les combattants sahraouis. Une autre façon d’imiter les algériens en laissant indéfiniment ouvertes les portes de la réconciliation.

Le désastre diplomatique de Bouteflika

Face à cette cascade de succès marocains, on ne peut que s’interroger sur l’anesthésie qui frappe le pouvoir algérien. L’explication est double.

Tout d’abord ce conflit n’a jamais reçu d’adhésion populaire, les algériens se contrefichent de cette histoire de Sahara. Hormis un FLN moribond qui ne s’exprime sur ce lourd héritage que du bout des lèvres, les partis politiques ont ouvertement déclaré leur désaccord sur la position algérienne et n’ont aucun contact avec le Polisario. C’est ce qui a encouragé la témérité de l’Association du Sahara Marocain à venir en Algérie même faire du lobbying pour la résolution du conflit.

Ensuite, la gestion du Polisario a toujours été une chasse gardée du clan d’Oujda dirigé par le couple Boumediene-Bouteflika et les chefs de la Sécurité Militaire. Après la mort de Boumediene et la mise à l’écart de Bouteflika et Kasdi Merbah, patron de la SM, c’est le général Larbi Belkheir qui s’est accaparé de ce dossier stratégique et lucratif où s’entremêlent diplomatie parallèle, fonds secrets et commerce d’armes.

Depuis la disparition mystérieuse de Belkheir, très malade selon sa famille ou décédé selon d’autres sources, on ne sait plus qui est vraiment en charge de ce dossier. Le très efficace chef du contre-espionnage, le général Smaïn Lamari qui gérait le Polisario sous les ordres de Belkheir, est décédé en été 2007 sans qu’on sache vraiment qui l’a remplacé.

De plus en plus isolés à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, Bouteflika et son clan d’Oujda ont définitivement perdu la bataille du Sahara Occidental. La dernière gifle retentissante qu’a reçu Bouteflika vient de son ami Khaled qui, après avoir exprimé publiquement ses griefs contre l’anti-marocanisme du gouvernement algérien, a entériné la marocanité du Sahara en allant chanter au dernier festival du dromadaire à Laâyoune.

Placé en situation d’échec et mat par la maîtrise d’œuvre marocaine et la péremption politique de Bouteflika, il ne reste au pouvoir algérien qu’une porte de sortie dans ce conflit. Abandonner son intransigeance, laisser le Polisario négocier librement, seul et sans aucune contrainte, fermer les camps de Tindouf et ouvrir les frontières avec le Maroc.

Saâd Lounès
http://www.pressealgerie.com/lequotidiendalgerie.htm

L’ONU humiliée à Tindouf

octobre 4, 2009

Il y a du nouveau sur le dossier du Sahara. Du sensationnel à l’état pur. De quoi s’esclaffer à l’étouffement. C’est tellement gros, tellement inattendu qu’on a du mal à y croire, sur un terrain diplomatique complètement figé, comme pétrifié dans un désert endurci.
Bref du faux suspens. Soyons magnanime, malgré tout. Rassurons d’abord les gouvernants d’Alger, civils et militaires. Ces nouvelles n’ont accouché que du négatif, cousu mains, par leurs propres soins. On les entend d’ici pousser un grand ouf.
De quoi s’agit-il, au fait? Récemment, le directeur général du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), relevant directement de l’ONU, Antonio Guterres, a fait une tournée dans les pays de la région, particulièrement en Algérie et au Maroc, puisque c’est là que ça se passe, plus qu’ailleurs. De passage à Tindouf, via Alger, il a proposé de procéder à un recensement des “réfugiés”. C’est son rayon, quasiment exclusif, hormis quelques ONG parmi les moins douteuses d’entre elles.

Légitimité
Quoi de plus normal, donc, que de vouloir quantifier cette population, selon les critères et les techniques de la démographie et de la statistique. D’autant plus qu’il n’y a pas eu de recensement fiable et reconnu, depuis celui organisé, en 1970, par l’Espagne, ancienne puissance coloniale. M. Guterres, ancien Premier ministre portugais, a déployé tout son savoir-faire et sa longue expérience, pour essayer de convaincre ses interlocuteurs du bien fondé et de la légitimité de sa démarche. En vain. Les responsables du Polisario, aux ordres d’Alger, n’ont rien voulu savoir. «Ce sont nos “refugiés”; c’est à nous de les compter et à personne d’autre, y compris l’ONU». M. Guterres a été édifié par tant d’arrogance et de défiance qui n’ont d’égal, à travers le monde, que l’attitude d’Israël à l’égard des instances onusiennes. Pourquoi diable, le Polisario craint-il, comme une épidémie de grippe A, ce type de comptage, sous des auspices dignes de foi, sinon totalement incontestables? La réponse est dans la question. Non seulement elle coule de source, mais elle est connue de tous.

Sauf qu’elle est si grossièrement flagrante qu’elle devient inavouable. Chacun sait que le Polisario gonfle le nombre de “ses réfugiés” pour récolter le maximum d’aide auprès d’institutions et d’ONG internationales. “Les réfugiés” sont ainsi utilisés pour faire la manche sans frontières. Quant à l’aide, preuve a été faite qu’une grande partie de ce pactole est régulièrement détournée par la bande à Mohamed Abdelaziz, pour son propre confort, ses multiples déplacements et pour soulager, un tant soit peu, le tuteur algérien. Mme Mitterrand, épouse du défunt Président français, a fait l’amère expérience de cette supercherie à grande échelle, qu’elle a publiquement dénoncée, après s’être naïvement mise au service du Polisario pendant de longues années. Un désaveu murement réfléchi et néanmoins spectaculaire. Le plus étonnant dans ce refus du Polisario, c’est que celui-ci continue à mettre en avant son leitmotiv de référendum. Sur quelles bases chiffrées peut-on alors organiser cette consultation populaire? De quoi faire perdre son latin au plus chevronné des diplomates. On comprend du moins pourquoi le Polisario, toujours sur ordre d’Alger, avait méthodiquement saboté l’opération d’identification du corps électoral sahraoui, sous contrôle de la Minurso. De guerre lasse, le Maroc a fini par renoncer à cette option, pour prospecter et proposer d’autres solutions, tel le statut d’autonomie interne élargie pour le Sahara.
Une offre ultime qui sauvegarde l’intégrité territoriale du pays. Niet, à l’unisson, d’Alger et du Polisario. C’est l’indépendance; à savoir l’amputation et l’encerclement du Maroc, avec l’implantation d’une nouvelle wilaya algérienne sur son flanc sud; ou rien. Rien que ce qui relève de l’inacceptable. Pour sa part, le Maroc a profité de la venue de M. Guterres pour faire une proposition temporaire, à caractère humanitaire: l’aménagement d’un corridor terrestre entre Tindouf, en territoire algérien, et le Sahara marocain; bien évidemment, sous l’autorité de l’ONU. L’objectif est de permettre aux familles sahraouies des deux côtés, séparées depuis trente quatre ans, de se rencontrer, en toute liberté de mouvement et, éventuellement, d’installation.

Chantage
Cela devrait également pallier les lenteurs extrêmes des échanges de visites par intermittence et par avions frappés du sigle onusien. À ce rythme, il faudra d’autres longues décennies pour que les Sahraouis se retrouvent, avant de devenir méconnaissables ou de passer de vie à trépas. Pas question, fait dire Alger à son Polisario. «L’idée du corridor est dangereuse, car rien ne garantit que “nos réfugiés” reviendront. Les Marocains le savent. Nous aussi. Si on accepte, c’en est fini pour les camps. Cet engrenage est mortel». Un niet de plus. Force est de reconnaître que l’attitude du donneur d’ordre d’Alger est compréhensible. Mieux vaut, pense-t-il, une “république” avec une population sous les tentes que pas de population du tout.

Piraterie
Mais ceux qui avaient encore des doutes en sont pour leurs frais. Les Sahraouis de Tindouf ne sont pas des réfugiés. Ce sont des séquestrés, c’est-à-dire des otages, retenus contre leur gré; une monnaie de chantage algérien à l’adresse du Maroc. Ainsi se résume la situation, pas plus.

Le plus viendra du représentant de l’Algérie auprès du bureau de Nations unies à Genève, lors d’un Conseil des droits de l’Homme tenu le jeudi 17 septembre 2009. Il s’est fendu d’une diatribe invraisemblable sur les droits de l’Homme au Maroc. Sans vergogne. Pareil discours venant d’Alger est totalement surréaliste. C’est, d’ailleurs ce qu’a répondu notre ambassadeur à Genève, Omar Hilal. Il a commencé par faire part de son étonnement de voir le diplomate algérien se préoccuper plus de la situation des droits de l’Homme au Maroc que dans son propre pays.

Et de s’interroger: «Dans quel pays Amnesty international est interdite depuis 2005? En Algérie, pas au Maroc, où elle dispose d’un bureau. Dans quel pays Human Rights Watch est privée de visa? En Algérie, pas au Maroc, où elle jouit d’un accès libre et permanent. De même que c’est en Algérie et pas au Maroc que la Fédération internationale des droits de l’Homme est déclarée indésirable…». Et d’ajouter que le groupe de travail sur les disparitions forcées a été accueilli au Maroc, alors que l’Algérie a refusé de le recevoir. En trois questions et quatre réponses, le tableau était brossé dans sa réalité vraie.

Le lendemain, 18 septembre 2009, un documentaire, projeté dans une salle du bureau genevois de l’ONU, raconte le calvaire de 94 Marocains dans des bagnes du sud-est algérien, pendant un quart de siècle. Il s’agit de pêcheurs sur des bateaux battant pavillon marocain ou étranger, enlevés par des éléments du Polisario, dans les eaux territoriales du Maroc, au large des côtes qui ne souffrent aucune contestation, de quelque nature que ce soit. Lors de la présentation de son film, Les rescapés de l’enfer, la réalisatrice, Yasmine Khayat, a qualifié cet acte ignoble de piraterie qui nous ramène au temps des corsaires en haute mer. Au regard de ces faits, qui constituent la triste actualité voulue et entretenue par nos voisins de l’Ést, on est loin, bien loin de la normalisation des relations entre l’Algérie et le Maroc. Il n’y a pas l’ombre d’un début de commencement dans ce sens. L’Algérie a bel et bien emboîté le pas au Maroc, neuf mois après, en supprimant le visa pour les ressortissants marocains, le 3 avril 2005.

Un coup d’épée dans l’eau, car les frontières, elles, restent fermées depuis août 1994, suite à l’attaque contre l’hôtel Atlas Asni à Marrakech, où des terroristes d’origine algérienne étaient impliqués, arrêtés et jugés. Le Maroc n’a cessé d’appeler l’Algérie à revoir sa politique des portes closes. Sans résultats, à ce jour. Près d’un million d’Algériens sont ainsi empêchés de se rendre au Maroc, par la seule volonté de leurs gouvernants. Un état de fait qui place l’Algérie parmi les régimes anachroniques, tels Cuba et la Corée du Nord, où l’on confisque aux citoyens leur droit de circuler par-delà les limites de leurs pays.

Anachronique
Les échanges commerciaux bilatéraux, dans un cadre maghrébin où chaque entité nationale trouve ses intérêts bien compris, sont également bloqués. Un énorme gâchis et autant de manque à gagner pour les peuples de la région. La rigidité et l’hostilité obsessionnelles d’Alger constituent l’unique cause de ce blocage. L’affaire du Sahara, montée de toutes pièces par Houari Boumediene et pérennisée par ses successeurs, n’est qu’un prétexte sur un fond de culture de la haine et d’ambitions hégémoniques avouées.
Une posture défiant tout entendement, dont a hérité Christopher Ross, le dernier en date parmi la longue lignée de médiateurs onusiens chargés du dossier. Après les échecs répétitifs des rencontres de Manhassett, M. Ross, lors de sa tournée dans la région, en février 2009, a mis sur la table des pourparlers informels qui définiraient l’agenda des négociations et l’ordre du jour, avant de retourner dans la banlieue newyorkaise. Depuis, il n’y a pas eu de suite.

Ce sont, par contre, les contrats d’armement qui font l’objet d’études des instituts internationaux et accaparent l’attention de la presse étrangère. Le rapport 2008 de l’Institut de recherche pour la paix, basé à Stockholm, sur le sujet, est encore tout chaud. Son contenu a été décortiqué et commenté dans le n°839, du 15 au 21 mai 2009, de Maroc Hebdo international.
Voilà que Asharq Al Awsat, citant une source algérienne, nous apprend dans sa livraison du 18 septembre 2009, que l’Algérie a passé un accord d’une valeur de 4 milliards d’euros, avec l’Italie, pour l’achat de 6 frégates FREMM (Frégate européenne multi-missions) et des navires de guerre équipés de missiles anti-sous-marins de fabrication américaine. Cet accord remplacera une commande similaire préalablement faite à la France. Motif de cette annulation: Paris a signé avec Rabat un protocole d’acquisition de frégates du même type. Après les gros contrats conclus avec la Chine, l’Inde et le Brésil, d’un montant global de 10 milliards de dollars; c’est au tour de l’Italie de profiter de la prodigalité algérienne; 100 hélicoptères lui ont été commandés. Quant à la Russie, qui reste le premier fournisseur de l’Algérie, elle a déjà livré à celle-ci, début 2009, un escadron d’avions de chasse Sukhoï 30.

Le reste arrivera durant l’année en cours. La supériorité en armement est donc en faveur de nos voisins de l’Est, forts de leur manne pétrolière. Le Maroc tente, tant bien que mal et avec peu de moyens, de suivre le mouvement. Le congrès américain aurait donné son feu vert pour la vente de 24 avions de combat F16, à Rabat. La transaction est évaluée à 2,4 milliards de dollars. La nouvelle a fait le tour des publications nationales depuis le samedi 19 septembre 2009.

“Qui veut la paix, prépare la guerre”, conseille le dicton. Alger, surtout, et, dans une moindre mesure, Rabat, ne dérogent pas à la règle. Quiconque parlerait d’une normalisation, autre que par un arsenal militaire de dissuasion, passerait pour un dangereux utopiste.

Article publié sur le site http://www.maroc-hebdo.press.ma
Auteur : A. Mansour

Pour les États-Unis, le Maroc est un allié fiable

juillet 30, 2009

Décidément, la politique étrangère de Barack H. Obama tranche avec celle de son prédécesseur, George W. Bush. Contrairement à celui-ci qui ne cessait de créer de nouvelles crises internationales, celui-là s’est engagé dans le sentier de leur résolution. D’où son appel au Maroc pour pour l’aider à préparer les conditions d’une paix israélo-arabe globale et définitive.

Après l’élection le 4 novembre 2008 de Barack Hussein Obama comme nouveau président des États-Unis, Mohammed VI, roi du Maroc, lui a envoyé une série de lettres. Il lui demandait notamment d’œuvrer en faveur de la paix au Moyen-Orient. Une condition incontournable pour l’amélioration des relations islamo-américaines

Étant lui-même conscient de l’importance de la résolution de cet important conflit pour la sécurité nationale américaine et l’avenir du leadership international de son pays, Obama s’est engagé à tout faire pour le résoudre, devant le monde islamique, lors de son discours historique du Caire (4 juin). C’est pourquoi la correspondance de Mohammed VI à cet effet tombait à point nommé pour le nouveau locataire de la Maison-Blanche.

Il fallait attendre le 3 juillet, c’est-à-dire la veille des célébrations du jour de l’Indépendance américaine, pour que finalement Obama envoie sa missive. Un geste rassurant au passage pour un Rabat qui ne savait plus à quelle enseigne logeait le nouveau président américain.

Cette lettre est très importante à plusieurs titres. D’un point de vue diplomatique, elle a notamment montré à Mohammed VI le rôle que Washington aimerait voir le Maroc assumer pour contribuer à la résolution globale et définitive du conflit israélo-arabe.

Le rôle du Maroc dans la résolution obamienne du conflit israélo-arabe

Fidèle à sa démarche de travailleur communautaire, Barack Obama sait combien la dimension psychologique est importante quand arrive le moment de bâtir des ponts de compréhension, de confiance et d’aide mutuelles avec des partenaires potentiels. C’est pourquoi il devait rassurer un interlocuteur marocain inquiet à cause notamment de ce qui se passait au Moyen-Orient.

Ainsi, d’entrée de jeu, le président américain a entrepris de rassurer le roi marocain. Il lui a notamment affirmé partager avec lui «des principes communs de justice et de progrès, de tolérance et de dignité pour tous les êtres humains.» Des principes devant, selon lui, «inspirer (tout le monde pour) atteindre une paix globale qui comprend une solution à deux États et une résolution rapide du conflit arabo-israélien.» Tout comme ses prédécesseurs, Obama a exprimé là sa volonté de renforcer les liens entre les deux pays. Pour gratifier ces propos d’une touche personnelle, Obama a dit à Mohammed VI combien il appréciait son «engagement personnel en faveur de la promotion du dialogue entre les religions et les cultures». Des déclarations bien appréciées à Rabat.

Pour la cause de la paix au Moyen-Orient stricto sensu, le locataire de la Maison-Blanche a déclaré bien apprécier les efforts de son homologue marocain, sur la base des principes partagés de «justice et de progrès, de tolérance et de dignité pour tous les êtres humains». Dans la suite de sa déclaration historique au Caire, où il a exprimé sa volonté de bâtir de nouvelles relations entre son pays et l’ensemble du monde islamique. Pour lui, ses principes sont de nature à aider à «atteindre une paix globale qui comprend une solution à deux États et une résolution rapide du conflit arabo-israélien».. Et c’est là que le roi marocain pourrait l’aider.

Ici, il s’est adressé au «président du Comité Al-Qods» (Jérusalem). Il lui a demandé d’intervenir auprès de ses homologues du monde musulman pour qu’ils «agissent de manière constructive en vue de la réalisation de nos objectifs communs», c’est-à-dire la solution des deux États et une résolution rapide du conflit arabo-israélien».

Comment ?

Travailler de concert avec le président en titre du «Comité Al-Qods» est censé, de son point de vue, «mettre en place les bases de négociations fructueuses en faveur de la paix pour tous les peuples de la région», israélien comme arabes (palestinien, libanais et syrien). Mais arriver à un tel résultat est, selon Obama, fonction de gagner la confiance des parties concernées directement par le conflit. C’est une condition nécessaire pour qu’elles s’engagent de «manière constructive» dans les négociations.

Pour faire preuve de bonne volonté et de sérieux, la partie israélienne devrait, selon Obama, remplir notamment les conditions suivantes: «l’arrêt des implantations, le démantèlement des avant-postes et la levée des barrages». S’il a insisté encore une fois sur ces conditions, c’est qu’il est conscient combien ils représentent des obstacles réels à la création de tout État palestinien viable et indépendant, et donc à toute paix arabo-israélienne globale, définitive et juste. Au grand dam de la droite nationaliste et de l’extrême droite israéliennes, une coalition ouvertement opposée au principe même de tout État palestinien digne de ce nom.

De leur côté, les Palestiniens devraient continuer «de renforcer leurs forces de sécurité afin de combattre le terrorisme (des groupes islamistes et nationalistes), de mettre fin à son incitation (à la violence)» et «de réformer leurs institutions pour (enfin aboutir à) la création d’un État palestinien». Ces conditions sont primordiales pour donner de la crédibilité à l’Autorité palestinienne et pour rassurer une population israélienne traumatisée par des vagues successives d’attentats terroristes perpétrées du côté israélien de la «ligne verte» (c’est-à-dire la ligne de l’armistice de 1948-1949 qui est généralement considérée implicitement par la communauté internationale comme la frontière séparant les deux parties en conflit).

Mais pour éviter que les Israéliens ne se servent de l’argument de la faiblesse des institutions de l’État embryonnaire à garantir sa sécurité à la frontière, Obama aimerait voir les pays arabes prendre leurs responsabilités vis-à-vis de leurs frères palestiniens. Dans ce sens, ces États devraient apporter «un appui financier (conséquent) et politique (sans équivoque)» à «l’Autorité palestinienne» (et donc non au gouvernement palestinien).

La nuance est ici de taille

Depuis les manœuvres illégales du régime de Mahmoud Abbas pour conserver, au mépris de la voix des urnes, son contrôle sur les institutions de l’Autorité palestinienne et le coup d’État du Hamas qui s’en est suivi, le leadership palestinien est profondément divisé. Si cette situation de blocage politique sert les intérêts étroits de politiciens assoiffés de pouvoir, elle menace à terme les intérêts nationaux du peuple palestinien et ses aspirations à un État souverain.

Un engagement arabe animée d’une «vision de paix durable» présente, selon le président américain, un avantage supplémentaire pour les puissances arabes sunnites, à savoir de ne pas livrer les Palestiniens à une République islamique d’Iran, qui rêve du jour où elle mettrait une main basse sur la cause palestinienne et s’assurerait ainsi un capital de sympathie dans l’ensemble du monde islamique.

N’oublions pas à cet effet que Téhéran entend se servir de son appui politique et financier à des groupes islamo-nationalistes comme le Hamas et le Jihad islamique pour élargir sa base d’appui musulman et renforcer sa puissance au Moyen-Orient. À la défaveur d’Israël et des puissances arabes sunnites.

Pour contribuer à renforcer la portée de la cause et du camp de la paix au sein même d’Israël, Obama a demandé à Mohammed VI, en sa qualité de «président du Comité Al-Qods», de l’aider à convaincre ses homologues arabes à poser «des gestes envers Israël, allant dans le sens de la fin de son isolement dans la région». Des gestes qui ne seraient nullement contraires à l’esprit de «l’Initiative Arabe de Paix», votée à Beyrouth (2002), sous le patronage du roi Abdallah d’Arabie saoudite. Le président américain disait espérer, à l’aide d’un leadership marocain, voir ces mesures contribuer à «la réconciliation entre Israël et le Monde arabe».

Raisons du choix du Maroc par Obama

Le choix américain du Maroc pour assumer un tel rôle d’importance n’est pas le fruit du hasard. Avec le temps, ce pays s’est révélé le meilleur interlocuteur arabe de toutes les parties en conflit.
Plusieurs pays arabes avaient souvent manipulé le «jeu palestinien», conformément à leurs intérêts nationaux (Jordanie, Égypte, Syrie, Libye, Irak, Arabie, Algérie). Certains sont allés jusqu’à réprimer brutalement les Palestiniens (Jordanie, Liban et Koweït) ou les priver de droits civils (Liban, Égypte). Le Maroc a, quant à lui, fait à cet égard preuve de plus de maturité. Il a d’abord évité de s’ingérer dans les affaires palestiniennes, tout en apportant son appui politique, diplomatique et financier à leur lutte de libération nationale. La population marocaine n’a jamais quant à elle cessé de leur exprimer son soutien. Ceux des Palestiniens qui avaient choisi le Maroc comme pays de refuge, n’étaient pas objet de discrimination ou d’oppression. Plusieurs d’entre eux sont même devenus de prospères hommes d’affaires. Après l’«errement» irakien d’Arafat, suite à l’annexion du Koweït par Bagdad, Hassan II s’est dépensé pour sauver le soldat Arafat. Ce qui lui a gagné la reconnaissance du chef palestinien et de son mouvement national.

C’est également au Maroc que l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) a vu un sommet de la Ligue arabe la reconnaître, pour la première fois de son histoire, comme la seule représentante légitime du peuple palestinien. Au bonheur de Yasser Arafat. Cette reconnaissance historique, qui porte l’empreinte de la diplomatie marocaine, enterrait de jure «l’option jordanienne», c’est-à-dire les prétentions du roi Hussein sur les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967. Elle venait également renforcer la position des Palestiniens face à des puissances arabes qui ne cessaient de s’ingérer dans leurs affaires intérieures, au nom dudit combat commun contre «l’entité sioniste» ennemie. Depuis, Rabat n’a jamais cessé de soutenir la lutte d’émancipation du peuple palestinien. Rejoignant en cela un consensus national marocain.
C’est cette dynamique qui explique la confiance du leadership palestinien dans le réalisme et la justesse de la «politique palestinienne» du Maroc, et en fait un médiateur crédible.

Plusieurs facteurs plaident à Jérusalem cette fois en faveur d’une médiation marocaine. C’est à Rabat qu’est notamment revenu le rôle de médiateur entre les parties égyptienne et israélienne, lors de rencontres secrètes qui devaient, un peu plus tard, aboutir à la visite historique du président égyptien Sadate à la Knesset israélienne (1977) et à la signature des accords de paix israélo-égyptiens à Camp David (1978), avec le parrainage du président américaine Carter.

C’est également au Maroc (Fès) qu’un Sommet arabe a adopté (1982), à l’unanimité, le plan arabe de paix (avec Israël). Une première dans les annales diplomatiques arabes. Le plan de Fès prévoit une reconnaissance implicite de l’existence de jure cette fois d’Israël (point 7), en échange de son retrait des territoires arabes occupés depuis 1967 et la création d’un État palestinien.

Le Maroc n’a jamais rejoint ledit camp du «refus arabe» (de normalisation des relations avec) Israël. Il a toujours fait preuve de réalisme. Même aux moments les plus difficiles dans les relations d’Israël avec son environnement arabe, Rabat a toujours gardé un contact avec Jérusalem. La fermeture du bureau israélien de liaison au Maroc (2000) n’a rien changé à cette situation. D’ailleurs, de hauts officiels des deux pays se rencontraient de temps à autre au Maroc comme à l’étranger.Pour les États-Unis, le Maroc est un allié fiable. Contrairement à plusieurs pays arabes, il a toujours été d’une fidélité sans tâche. Pour rappel, c’était aussi la première puissance à reconnaître l’indépendance de la jeune République américaine. D’ailleurs, Mohammed VI a lui-même exprimé son souhait de pouvoir être associé au processus de paix israélo-arabe dans un cadre plus large de «coopération productive avec les États-Unis».

La demande des États-Unis au Maroc de reprendre son rôle traditionnel de leader de la relance de la paix israélo-arabe, a été bien accueillie à Rabat.

Sources : http://www.tolerance.ca/Article.aspx?ID=52549&L=fr
Auteur: Aziz Enhaili

Non à la présidence à vie

novembre 23, 2008

Rachid Benyellès, général à la retraite. Ancien chef d'état-major de la marine algérienne

Rachid Benyellès, général à la retraite. Ancien chef d

Dans les semaines qui avaient suivi sa désignation à la tête de l’Etat, M. Bouteflika menaçait à tout propos de « rentrer chez lui en laissant les Algériens à leur médiocrité ». Cela, jusqu’au jour où des voix, excédées par tant d’impudence, se sont élevées pour lui dire « chiche ! » Depuis, il n’est plus jamais revenu sur ce sujet.

Après avoir passé un premier quinquennat à sillonner la planète et une grande partie du second à lutter contre une maladie qui l’a contraint à suspendre toute activité des mois durant, le voilà maintenant, malgré ce lourd handicap, qui se prépare à un troisième quinquennat. A l’instar de beaucoup d’autres potentats, ailleurs dans le monde, M. Bouteflika a toujours voulu être un président à vie. La seule question pour lui était celle de choisir le moment opportun pour annoncer le changement d’une Constitution qui limite le nombre de mandats à deux.

Hélas !, la démocratie et l’alternance ne font pas partie du lexique de l’Algérie de M. Bouteflika, ni d’ailleurs de celui de toutes les contrées arabes qui, sans exception aucune, demeurent dirigées par des régimes autocratiques. Encore que, à la différence de l’Algérie de M. Bouteflika, ces pays puissent néanmoins se prévaloir de réalisations qui font pâlir d’envie nos concitoyens. Ceci est particulièrement vrai pour les pétromonarchies du Golfe. Plus proches de nous, le Maroc et la Tunisie sont parvenus à de bien meilleurs résultats, sans pour autant disposer de nos ressources naturelles et de notre formidable manne pétrolière.

En fait, l’Algérie de M. Bouteflika a connu une régression accélérée, pour ne pas dire une dégénérescence. Cela tient, pour l’essentiel, à la qualité du chef et à ce qu’on appelle aujourd’hui la « gouvernance ». Or l’Algérie de M. Bouteflika se distingue précisément par la non-gouvernance. Le pays est abandonné à lui-même, dérivant sans cap et sans destination, frémissant aux seules pulsions du prince et à son bon vouloir.

Le bilan de M. Bouteflika au cours de ces dix années passées à la tête de l’Etat est malheureusement catastrophique, n’en déplaise à ses courtisans. S’il fut un temps où l’Algérie jouait un rôle moteur dans le monde arabe, force est aujourd’hui de constater qu’elle ne pèse plus rien ! Traités comme des pestiférés, nos concitoyens n’ont jamais été autant humiliés pour obtenir un visa et aussi mal accueillis à l’étranger, particulièrement dans certains pays dits « frères » où ils sont malmenés, et parfois agressés, sans que cela ne provoque la moindre réaction officielle. Classée par Transparency international parmi les pays les plus corrompus de la planète, loin devant les pays voisins du Maghreb, l’Algérie affiche aussi les plus mauvais résultats en matière de développement humain et de liberté d’expression.

De quel succès M. Bouteflika et ses encenseurs peuvent-ils se prévaloir lorsque les gouvernements des grandes puissances recommandent à leurs ressortissants d’éviter notre pays et à ceux, très peu nombreux, qui y résident encore, de le quitter ? De quel résultat peuvent-ils se prévaloir lorsque le peu d’entreprises étrangères présentes en Algérie ne prennent aucun risque et se limitent à l’ouverture de simples comptoirs commerciaux ?

Quelle image de l’Algérie peuvent-ils donner à l’extérieur lorsque des milliers de jeunes et moins jeunes Algériens (les harragas), poussés par le désespoir, tentent, au péril de leur vie, de traverser la Méditerranée à bord d’embarcations de fortune pour rompre avec un pays qui ne leur offre plus aucune perspective ?

M. Bouteflika aurait été bien mieux inspiré s’il avait consacré un peu de son temps à restaurer l’image de l’Algérie auprès des Algériens tout d’abord, en les retenant chez eux, en leur donnant confiance en leur pays et en leurs dirigeants. Pour ce qui est du rétablissement de la paix et de la sécurité, l’autre chantier prioritaire de M. Bouteflika, cet objectif n’a pas été atteint. Malgré le décuplement des effectifs des forces de sécurité, tous corps confondus, et l’allocation de budgets exorbitants, le terrorisme n’a pas été vaincu. La situation n’est certes plus celle du début des années 1990, mais la paix et la sécurité sont loin d’être rétablies. Par contre, sous le règne de M. Bouteflika, un phénomène nouveau, inconnu jusqu’alors dans la région, est apparu – celui des attentats kamikazes.

Au plan politique, tous les acquis démocratiques d’octobre 1988 ont été balayés au cours de la dernière décennie. L’état d’urgence a été maintenu et ses dispositions les plus restrictives ont été renforcées, à seule fin d’interdire les manifestations et réunions publiques. La vie politique a été réduite à néant, et les institutions du pays, ou ce qui en tient lieu, ont été marginalisées et traitées avec mépris comme cela ne s’était jamais produit auparavant. Les quelques partis politiques autorisés à fonctionner ne sont que des coquilles vides. Aucune organisation politique, même lorsqu’elle a rigoureusement rempli les exigences fixées par la loi, n’a été agréée. Toujours par le même fait du prince. Les syndicats libres ne sont pas reconnus, et leurs dirigeants font l’objet de mesures coercitives scandaleuses.

La liberté d’expression a été muselée ; les journalistes qui osent porter un jugement critique sur les pratiques du régime sont jetés en prison sous divers prétextes. Les innombrables émeutes qui éclatent régulièrement dans l’ensemble du pays sont réprimées avec la plus grande brutalité. Le régime de M. Bouteflika ne se montre performant que lorsqu’il s’agit de briser des manifestations, renier les droits de l’homme et les libertés fondamentales ou susciter la zizanie et la discorde dans les rangs des organisations et partis politiques qui refusent de jouer le rôle de satellites du système.

Dans les autres secteurs, le bilan de M. Bouteflika n’est, hélas, pas plus brillant. Aucun des pays de la région n’affiche une dépendance alimentaire aussi prononcée, et la situation ne fait qu’empirer. Au cours de la décennie écoulée, l’Algérie a enflé de manière anarchique, au mépris des règles d’urbanisme les plus élémentaires. D’une densité urbaine démentielle, des cités-dortoirs émergent aux quatre coins du pays. Elles sont construites à grands frais et dans la précipitation par des entreprises étrangères venues de tous horizons.

En matière de santé, il fut un temps où l’Algérie était à l’avant-garde des pays maghrébins. Des étudiants de tout le continent étaient formés dans nos universités, et des patients de toutes les nationalités étaient soignés dans nos établissements hospitaliers. Aujourd’hui, la situation s’est inversée. Lorsqu’ils veulent des soins de qualité, les agents du pouvoir en place, et ceux de nos concitoyens qui en ont les moyens, sont obligés d’aller dans les pays voisins. Alors que, dans ces mêmes pays, les besoins en médicaments sont couverts à plus de 80 % par la production locale, l’Algérie de M. Bouteflika importe pour près d’un milliard de dollars de produits pharmaceutiques. Une poignée de gros importateurs se partagent ce marché juteux en bénéficiant de facilités surprenantes.

L’Algérie ne produit presque plus rien et importe presque tout, aussi bien les produits manufacturés que les produits alimentaires. Au cours de la décennie écoulée, le secteur productif national public ou privé a été démantelé pour laisser le champ libre aux importateurs. Il n’y a pas de place pour un secteur productif créateur de richesses et d’emplois durables. Les entreprises publiques, grabataires pour la plupart d’entre elles, ont été maintenues en l’état, ni privatisées ni assainies, à la grande satisfaction des importateurs.

L’Algérie de M. Bouteflika est celle des scandales financiers, de l’affaire dite Khalifa et des banques publiques, des détournements massifs entraînant des milliards de dollars de préjudice pour le pays, de l’économie informelle dominante. Malgré ce bilan désastreux et les aléas liés à son état de santé, M. Bouteflika projette de se maintenir au pouvoir. A 72 ans, il veut un troisième quinquennat qu’il terminera à 77 ans, c’est-à-dire en vieillard, dans l’acception universelle du terme. C’est le pire fléau qui puisse frapper le pays !

Pour empêcher le viol qui se prépare, on ne peut malheureusement compter ni sur les dirigeants des démocraties occidentales, qui soutiennent à bras-le-corps un régime qui préserve leurs intérêts, ni sur des manifestations, même pacifiques, interdites au titre de l’état d’urgence. Peut-on pour autant accepter le fait accompli, abdiquer et se taire ?


Rachid Benyellès, général à la retraite. Ancien chef d’état-major de la marine algérienne

Source: Le Monde

Bouteflika for ever !

novembre 23, 2008

Le président algérien est l’archétype du “dictateur présentable”

Le président algérien est l’archétype du “dictateur présentable”

Par On entend, çà et là, quelques murmures réprobateurs relatifs à la manœuvre d’Abdelaziz Bouteflika qui a fait voter par un Parlement à sa botte une modification constitutionnelle lui permettant de briguer un troisième mandat de président de la République algérienne démocratique et populaire. Mais rien de bien méchant, et il ne faut pas s’attendre à ce que le monde se lève pour faire barrage à Boutef’, tant est présente la crainte d’une nouvelle poussée islamiste en Algérie.

Ainsi, celui qui fut dans les années 1960 le plus jeune ministre des Affaires étrangères en exercice sur la planète devrait être en mesure, à soixante-douze ans, de se succéder à lui-même pour un nouveau bail de six ans. Son élection ne fait pas question, la sincérité d’un scrutin présidentiel en Algérie aujourd’hui n’ayant rien à envier à celle des élections du deuxième collège (indigènes) au temps de l’Algérie française. Il s’agit seulement d’annoncer un résultat convenable. Les scores à la soviétique (supérieurs à 98 %) ne sont aujourd’hui pratiqués que dans quelques Etats d’Asie centrale où les despotes éclairés au gaz ne voient aucune raison de modifier des pratiques aussi anciennes que commodes.

Tout l’art consiste à bricoler un scrutin de telle manière à ce que les observateurs internationaux, qui ne peuvent être partout, soient contraints de reconnaître que “dans l’ensemble” l’élection s’est déroulée dans des conditions répondant aux critères démocratiques, tout en assurant une confortable majorité au candidat de l’oligarchie au pouvoir.

Si l’on ne s’émeut guère, en France et dans le monde, des péripéties politiques qui se déroulent de l’autre côté de la Méditerranée, c’est qu’on se soucie peu aujourd’hui d’encourager les pays du Maghreb à marcher hardiment vers la démocratie, l’économie de marché et un développement à l’asiatique de leurs capacités de production.

Le projet idéaliste “grand Moyen-Orient prospère et démocratique” lancé après la guerre d’Irak par une administration Bush sous influence des néos-conservateurs s’est cassé le nez sur le réel. Et le réel, c’est que l’instauration de la démocratie suppose que la structuration des forces productives et sociales soit suffisamment avancée pour que ceux qui produisentn les richesses participent à leur gestion. C’est le bon vieux No taxation without représentation qui lança la révolte des colonies américaines contre la métropole britannique.

Or, il suffit de lire la description parfaitement réaliste que donne, dans Le Monde, un ancien général, Rachid Benyellès, pour constater qu’après l’échec grandiose d’une expérience “socialiste” qui a détruit le tissu économique, agricole et entrepreneurial hérité de la période coloniale, l’économie algérienne est exclusivement fondée sur une rente pétrolière accaparée par une oligarchie politico-militaire. D’où cette situation absurde dans laquelle les entreprises chinoises appelées pour répondre en catastrophe à la pénurie de logements liée à la croissance démographique galopante ne trouvent pas de main d’œuvre locale, tandis que les chantiers français ne fonctionneraient pas sans la main d’œuvre algérienne et que des hordes de jeunes oisifs végètent dans les grandes villes du pays. Les Chinois viennent donc avec leurs ouvriers construire des immeubles pour les chômeurs algériens.

Malgré tout cela, et les frustrations que le régime incarné par l’inoxydable Bouteflika provoque au sein d’une population désemparée, il fait aujourd’hui figure de “dictateur présentable”, un modèle que la communauté internationale est prête à tolérer, voire à promouvoir.

Comme son ennemi intime le roi du Maroc, et son voisin Ben Ali, Boutef’ tient en lisière des islamistes radicaux exterminés brutalement dans leur composante militaire, mais à qui le régime sous-traite l’encadrement moral de la société.

Par ailleurs, Boutef’ arbitre avec un instinct de conservation remarquable conflits et rivalités entre les diverses factions de l’oligarchie, favorisant alternativement l’une ou l’autre d’entre elles, et faisant en sorte qu’aucune tête susceptible de lui faire de l’ombre n’émerge des cercles dirigeants.

Une certaine liberté d’expression est accordée à l’opposition politique, essentiellement kabyle, et à une presse qui a acquis, à partir de 1988, une indépendance de ton remarquable. Mais l’état d’urgence reste en vigueur, limitant fortement les libertés publiques, et l’intimidation judiciaire des journalistes trop irrévérencieux est une pratique de plus en plus fréquente.

Pendant ce temps-là les “trabendistes” (vendeurs de marchandises rares acquises au cours d’allées et venues régulières en France ou en Espagne) alimentent l’économie informelle qui assure le minimum à la population démunie, et les harragas, ces jeunes sans travail, risquent leur vie en contrôlant la traversée vers le nord sur des embarcations de fortune…

Le “dictateur présentable” ne sera pas sommé de respecter les recommandations des rapports annuels des ONG pointant du doigt la corruption où les atteintes aux libertés dans le pays qu’il dirige. On lui pardonnera même quelques pratiques brutales dans la répression de ses opposants, pourvu qu’il arrive à persuader les chefs des Etats démocratiques que ces derniers ont partie liée avec le terrorisme international, ce qui n’est pas très difficile. Il lui sera assuré un siège à la commission des droits de l’homme des Nations-Unies, où il pourra tout à loisir voter en rafale des motions condamnant Israël et tonner contre les anciens colonisateurs qui ont le culot d’interdire le port du voile islamique dans les établissements scolaires publics. Le job de dictateur présentable, sans être de tout repos car les Iznogoud sont partout, reste quand même attractif. Au point qu’un vieillard malade veuille en reprendre.

Par Luc Rosenzweig

Ancien journaliste au « Monde », Luc Rosenzweig est l’auteur de plusieurs essais dont « Lettre à mes amis propalestiniens » (La Martinière) et « Ariel Sharon » (Perrin).

Source : http://www.causeur.fr